• Une sombre histoire de lapins

    Chose promise, chose due, voilà enfin Une sombre histoire de lapins re publiée. J'ai mis un peu de temps, commencé de petites corrections, et modifié un tout petit détail pour faciliter la suite. C'est pas de la grande littérature (ça date d'il y a au moins 5-6 ans), c'est bourré de fautes je pense, et le scénario est plus que bancal, mais bon, en le relisant je suis plutôt contente de repérer ce genre de chose puisque cela signifie que maintenant je suis capable de scénarios plus cohérents et que mon style s'est grandement amélioré. 

    Bref, bref, bref, cette petite description ne donne sans doute pas envie de lire, j'avoue, mais mis à part ça, j'ai toujours envie de continuer avec le personnage de Kaelle quand je relis cette histoire, c'est en quelque sorte, un de mes personnages les plus construits et humains. J'ai pris et prends toujours énormément de plaisir d'écrire du point de vue de Kaelle. L'histoire, bien que se déroulant dans notre monde, a cette touche d'humour noir que j'adore cultiver et j'ai vraiment hâte de me remettre à l'écriture de la suite où j'approfondis encore plus la personnalité de ma mercenaire préférée, j'introduis deux autres personnages assez particuliers, et même Daniel, mon Bad James Bond, est un réel plaisir à écrire.

    Enfin voilà, j'espère que cette première histoire vous plaira quand même et vous donnera envie de lire la suite des aventures de Kaelle.

     

    Plein de gros bisous.  

     

     

    Sommaire 

     

     

    Prologue

    Chapitre 1

    Chapitre 2

    Chapitre 3

    Chapitre 4

    Chapitre 5

    Chapitre 6

    Chapitre 7

    Chapitre 8

    Chapitre 9

    Chapitre 10

    Chapitre 11

    Chapitre 12

    Chapitre 13

    Chapitre 14

    Chapitre 15

    Chapitre 16

    Chapitre 17

    Chapitre 18

    Chapitre 19

    Epilogue

     

     

     

    Prologue : Une berceuse pour Kaelle

    Sommaire 

    Un, deux, trois, nous irons au bois, quatre, cinq, six, cueillir des cerises, sept, huit, neuf…

     

    — Lucy, tu pourrais arrêter de chanter s’il te plaît ? 

     

    Lucy pencha sa petite tête blonde sur le côté, comme si je venais de lui parler en mandarin d’Afrique, regarda autour d’elle et, finalement, se pencha vers moi.

    — Mais si je ne chante pas, ils vont revenir.

     

    « Ils », c’était ces fucking lapins que Lucy voyait constamment. Quand je dis constamment, c’est même quand elle prenais pas de drogues, et, manque de bol : Lucy était la seule personne que je connaissais qui avait peur des lapins.

    J’avais demandé, un jour, à Eden, notre patronne, les causes de ces hallucinations, mais elle s’était contentée de hausser les épaules en me répondant par un vague :

    — Elle a vécu des choses très difficiles.

     

    Ouais ben moi aussi je n’avais pas été gâtée et ce n’est pas pour autant que je délire H24 ! Enfin, j'avait bien quelque chose, mais ça faisait tellement longtemps… Enfin bref… Je m’y étais habituée tout simplement parce que c’était ça ou je prenais la porte, perdant mon foyer et mon boulot.

     

    N’empêche qu’Eden avait tendance à ramasser tout ce qui traînait ! J’en étais la preuve vivante ! Au fond, elle l’avouera sans doute jamais, même sous la torture, mais c’était quelqu’un de bien.

     

    Je dis pas que gérer un petit groupe de mercenaires était quelque chose de bien, hein ! Parce que ouais, c'est ce qu'on était : des mercenaires.

     

    Au début, nous étions une dizaine, et puis, suite à une sorte de mutinerie, nous nous sommes retrouvées à trois : Eden, toujours à notre tête, Lucy et moi. Du coup on a décidé d’écumer le pays en camping-car pour élargir notre clientèle. Et puis, ne pas avoir d’adresse fixe était très pratique quand on faisait ce genre de métier. De temps à autre, Eden changeait la plaque d’immatriculation, quand elle ne changeait carrément pas de véhicule et usait de ses relations pour nous couvrir.

     

    Dix, onze, douze, elles seront toutes rouges…Un, deux, trois, nous irons au bois.

     

    AAAH mais bordel de merde ! Y avait pas moyen de l’arrêter quand elle s’y mettait ! Et il était… Il étaiiiiiiit…

    — Eden, dis-lui quelque chose, il est six heures du mat’ !

     

    Eden se retourna et je regrettai ma plainte. Eden roulait…

     

    — Lucy, ma belle, Kaelle doit être en forme pour sa prochaine mission, chante-lui plutôt une berceuse pour qu’elle se rendorme.

    — Ah ! Ah ! Ah ! Très drôle Eden… T’en as d’autres comme ça ?

     

    Le doigt de ma coéquipière vint m’écraser les lèvres.

    — Chuuuuutttt ! Ne contredis pas la reine arc-en-ciel ! m’ordonna-t-elle.

     

    La reine arc-en-ciel, ouais, vous avez bien entendu. Lucy avait sa propre façon de voir les choses et les cheveux multicolores coupés à la garçonne de notre chère et tendre patronne la fascinaient. Elle allait parfois même lui acheter des nouvelles teintures, histoire d’en rajouter. J'avais jamais su quelle était sa couleur naturelle depuis trois ans que j’étais à son service ! C’était sans doute un grand secret qu’elle emporterait dans sa tombe.

     

    Ou peut-être que sa couleur naturelle, c’était multicolore. Mystère.

     

    Enfin bon, chacune son truc : Eden se colorait les cheveux, Lucy se droguait de temps à autre et moi je flinguais des gens. Dit comme ça, ça faisait une sacrée bande de bras cassés, j’avoue, mais malgré ça, nous étions très efficaces sur le terrain. Enfin, j'avais jamais vu Eden à l’action, c’était elle qui gérait toutes les missions, mais c’était le genre de personne qui n’avait rien à prouver : tout était dans l’aura.

     

    Meunier, tu dors, ton moulin, ton moulin va trop vite, meunier, tu dors…

     

    Et merde…

    Je plaquai mon oreiller contre mes oreilles au-dessus de ma tête et fermai les yeux.

     

    Pour les rouvrir en sursautant.

    — Ça va ?

     

    Je croisai le regard d’Eden et tentai de me rappeler l’origine de ce réveil aussi brutal. Aucun souvenir.

    — Ouais, ça va. Ça devait être un cauchemar. On est arrêtées depuis combien de temps ?

    — Une heure à peu près. La prochaine mission ne se trouve pas très loin.

     

    Je remarquai la gêne de ma patronne. Pas bon ça. Et où était Lucy au fait ?

    — Qui est-ce qu’il faut éliminer ? demandai-je nonchalamment en m’étirant.

    — Justement…

     

    Ah non ! Pas de justement … Je détestais quand elle commençait par ce mot-là ! C’était toujours pour annoncer une mauvaise nouvelle ou me contredire. Dans le cas présent, je penchais plutôt pour la mauvaise nouvelle.

    — Il ne faut tuer personne.

     

    J’enfilai un sous pull et dégageai mes cheveux du col.

    — Un enlèvement ? Mais c’est Lucy qui se charge de ça généralement.

     

    Oui, oui, pas de commentaire, je vous vois venir, là. Lucy, en dépit de son physique d’adolescente mal nourrie, s’en sortait particulièrement bien dans ce domaine. Et discrétion assurée bien sûr ! Vous croyez quoi ? Qu’on était des amatrices ?

    — Justement, Lucy n’est pas opérationnelle…

     

    Je me figeai, un pied dans mon jean.

    — Drogue ?

     

    Pas de réponse = réponse positive.

     

    — Bordel, elle l’a trouvée où cette fois ci ?! T’avais pas fouillé ses affaires, la dernière fois ?

     

    Pas de réponse = Kaelle, fais pas chier. C’est un ordre.

     

    Je terminai de m’habiller en grommelant et entendis la douche s’enclencher tandis qu’une petite voix chantonnait doucement. Bon, eh bien maintenant je savais où était Lucy…

     

    Cette journée commençait très mal, et mon instinct me disait qu’elle n’allait qu’en empirant.

     

    Chapitre 1 : Et délivre-nous du Mal

     Sommaire

    La mission avait été inscrite sur un bout de papier plié en quatre que j’avais décidé d’ouvrir une fois sortie de la boulangerie, un croissant entre les dents, ce qui m’empêcha d’articuler quoi que ce soit pour râler quand je découvris ce qu’il fallait ramener.

    Oui, pas qui, mais quoi, et un prêtre plus précisément ! Ben voyons ! C’était bien ma veine ! Il fallait que le jour où je remplace Lucy je tombe sur ce genre de gus !

    Après avoir rapidement localisé l’adresse, je brûlai la feuille avec un briquet qui ne me quittait jamais, bien que je ne fume pas. Ce briquet n’avait pas de valeur sentimentale, je le trouvais juste sympa avec son pikachu dessus, et puis, il était bien pratique pour faire disparaître certaines preuves, allié à une bonne quantité d’essence.

    Eden ne m’avait pas déposée très loin de l’appartement de… Euh… J’avais oublié son nom… Enfin, quelle importance. Tant que je n’avais pas oublié l’adresse… Et tant que je ne me plantais pas de mec…

    Le prêtre Machin, appelons-le comme ça, habitait tout en haut de l’immeuble. Non, mais franchement, pour une fois que je me tapais un boulot merdique, ça l’était jusqu’au bout ! Manquait plus qu’il soit…

     

    ………

     

    …………

     

    ……………

     

    Mort.

     

    Crucifié par terre plus précisément.

     

    Je soupirai et me penchai sur le corps. Eh bien ! Ils s’étaient éclatés visiblement !  Mon regard compta les doigts coupés et les chercha un instant sur le sol où les tâches se concentraient, surtout aux alentours du cadavre, mais aussi sur la petite commode du fond. J’assemblai mentalement le bord du meuble et la marque qu’il avait sur le front. Visiblement, ça concordait. Après, je ne savais pas s’il était mort suite à cette blessure ou aux autres. Peu m’importais. La mission avait foiré. Enfin… C’était bien lui, hein ?

    Je décrochai mon téléphone et composai le numéro d’Eden. 

    — Quoi ?

    — La cible, il est vieux, à moitié chauve avec les yeux verts et une tache de naissance sur la mâchoire gauche ?

    — Tu avais une photo Kaelle...

    — Alors bonne nouvelle : je l'ai trouvé… mauvaise nouvelle : il est mort… mais re bonne nouvelle : c’est pas moi cette fois-ci…

     

    Pas de réaction. Le « cette fois-ci » ne la troublait même pas. Elle avait l’habitude que j’aie la gâchette facile et ce n’était pas pour rien qu’on me confiait que très rarement ce genre de mission. Quand Lucy était hors service par exemple…

    — Je fais quoi ?

    — Tu effaces tes traces et tu rentres. Elle marqua un temps de pause. Et essaye de voir s’il y a une pizzéria dans le coin.

    Elle raccrocha. Fin de la discussion.

     

    Je soupirai et mon regard bifurqua vers le cadavre. Pourquoi voulait-on qu’on le ramène ? Et pourquoi l’avait-on torturé ? C’était un prêtre, non ?  Que savait-il de si important ?

    Je songeai immédiatement aux confessions. Peut-être protégeait-il quelqu’un ? Avait-il parlé ?

     

    Ce n’était pas mes affaires.

     

    Je n’avais qu’à partir et j’en n’entendrais plus parler, mis à part aux informations…

     

    ………

     

    La curiosité était un vilain défaut, je sais.

     

    Et puis ce n’était pas de la curiosité si je découvrais un truc par hasard en nettoyant mes traces, même là où j’avais pas été ! Ce sont juste des précautions. Oui voilà. Des précautions.

     

    Quoi ?! Vous ne me croyez pas ? Vous connaissez peut-être mon métier ?! Non ? Alors no comment !

     

    J’enfilai mes gants en cuir et commençai à fredonner une chanson qui n’arrêtait pas de tourner en boucle depuis tout à l’heure.

     

    Welcome to the hotel California… Such a lovely place, such a lovely place, such a lovely face…

     

    Oh ! Tiens ! Un mystérieux petit carnet brun dans la doublure du matelas ! Quel hasard !

     

    Bon, bon, d’accord, j’ai dû l’éventrer, mais c’était pas comme si on allait me retrouver grâce à ça ! Surtout que je l’avais fait avec un couteau de sa propre cuisine ! Enfin bref,  je fourrai le carnet dans ma veste et vérifiai si je n’avais pas laissé quelques traces de pas. Non, aucune… bon eh bien…

     

    La sonnerie du téléphone me tira de mes pensées. Il n’y avait que deux personnes qui avaient mon numéro : Eden et Lucy. Sauf que Lucy n’utilisait jamais de téléphone. Ce fut donc sans surprise et sans enthousiasme que j’entendis la voix de ma patronne résonner dans l’appareil.

    — Tu t’es perdue ou quoi ?

    — Non, je me suis arrêtée pour jouer aux cartes avec le pape. (règle de base : à toute question con, réponse con.)

    — Très drôle. N’oublie pas les pizzas.

     

    Ce qu’il y avait de bien avec Eden, c’est qu’elle ne s’éternisait jamais au moment de raccrocher.

    Je descendis les escaliers, les mains dans les poches, sifflotant, et partis à la recherche d’une pizzéria sur le chemin.

    Finalement, je fus acclamée comme le messie par mes collègues lorsque j’arrivai avec une pizza à l’ananas pour Eden, une aux anchois pour Lucy, et sans oublier une quatre fromages pour moi-même. Comme quoi, il ne fallait pas grand-chose……

     

    Plenty of rooms at the hotel California…

     

     

    Chapitre 2 : Eden a peur

     Sommaire

    Eden roulait. Elle ne semblait pas plus inquiète que ça vis-à-vis de ma récente découverte. Selon elle, si j’avais effacé mes traces, tout irait pour le mieux. N’empêche que j’étais sûre qu’elle changerait bientôt de véhicule. On n’est jamais trop prudentes.

     

    Je m’étais posée dans un coin pour lire ce que j’avais trouvé chez Machin et… ce n’est pas que je n’y avais rien trouvé, au contraire. J’en avais trop trouvé. À croire qu’aucun criminel ne savait que la confession, c’était dépassé. Parce que les prêtres, c’était des pipelettes des fois ! Enfin, visiblement, celui-là avait opposé une certaine résistance. Avait-il parlé finalement ? Mystère…

    J’avais lu une dizaine de fois les confessions les plus bizarres sans réussir à me fixer sur une seule d’entre elles. Il y en avait trop qui étaient trop louches. C’était… trop.   

     

    En plus, j’étais fatiguée. Ben oui ! C’est l’heure de la sieste, quoi ! Vous croyez quoi ? Que je joue aux cartes quand je ne tue pas ?

    Niet. J’avais bien essayé, mais c’était sans compter le seul adversaire possible : Lucy. Enfin, non. Lucy et ses lapins fictifs.  

    Avant, c’était ce qu’on faisait. J’avais appris tout un tas de jeux et je jouais toujours avec la même personne. Mais ça, c’était avant. Maintenant nous n’étions plus que trois. Enfin... Trois et des lapins fictifs.  Alors maintenant, ma nouvelle activité favorite, c’était la sieste. En plus, c’était chouette, ça me permettait de travailler à toute heure, surtout la nuit.

     

    Parce que c’était plus pratique de tuer la nuit.  

     

    Il paraît que jusqu’à 25 ans, l’être humain a une très grande capacité à s’adapter à n’importe quelle situation. J’approuvais. Je pouvais m’endormir presque partout et n’importe quand.  

    Par contre ils n’avaient pas intégré les comptines de Lucy dans leurs études… C’était pire qu’un réveil à l’armée ! Enfin, je suppose, parce que j’étais de cette génération qui n’avait plus qu’une simple journée d’appel. Que je n’avais pas faite, au passage.

    Je me levai et m'étirai en baillant. À côté, Lucy chantonnait en faisant tourner entre ses doigts le petit carnet trouvé chez le prêtre.

    Eden se retourna :

    — C'est quoi ?

    
Je me précipitai vers elle et lui évitai une déviation.

    — AAAH ! Regarde la route !

    
Cette dernière me regarda comme si de rien était et jeta un rapide coup d'œil à la route.
— Désolée, c'est mon gros défaut.

    
Gros défaut ! Et dire qu'on la laissait tout le temps conduire ! Bon, je ne dis pas que Lucy serait mieux… Elle éviterait les animaux fictifs en faisant de grands huit sur la route, et moi, je ne savais pas conduire un camion… mais bon, pourquoi pas… De toutes façons, je n'eus pas le choix quand Eden se leva en me demandant de la remplacer. Se souvenant un court instant que j'étais inapte à conduire un tel engin, elle se pencha sur moi, et m'indiqua rapidement les vitesses à passer ainsi que la route à suivre (mais vraiment très rapidement ! Avec des mots simples, et courts, souvent alignés dans un ordre dont elle seule avait le secret). Jetant un coup d'œil dans le rétroviseur, je la vis s'emparer (/arracher violemment des mains de Lucy) du carnet et le feuilleter.

    Sa mâchoire crispée n’augurait rien de bon. Aah mince ! La route, c’est vrai !

    — Pour la prochaine mission tu pars avec Lucy.

    — Pourquoi ?

     

    Je la laissai s’installer délicatement à ma place et reprendre le volant. C’était plus rassurant.

    — La personne qui m’a contactée pour Monsieur Grant m’a recontactée.

    Je ne réagis pas. Qui était Monsieur Grant ? ? ?

     

    Visiblement, Eden avait compris puisqu’elle précisa :

    — Le prêtre qui a été assassiné…

     

    Aaahh ! Machin ! Ok, je comprends mieux maintenant ! Enfin presque. Il me manquait deux-trois informations encore…

    — Elle a doublé la mise pour récupérer une autre personne.

    — Ça sent pas bon ça…

    — Je sais.

    —Alors comment ça se fait que tu continues ? On a largement les moyens de refuser.

     

    Eden ne répondit pas. Elle n’aimait pas avouer ses faiblesses.

    Ou alors il y avait quelque chose qu’elle nous cachait.

    Enfin, l’une des conditions pour ce boulot, c’était de lui vouer une confiance aveugle : nous ne posions pas de questions, elle n’en posait pas et comme elle avait tendance à ramasser presque que des résidus de l’humanité, ça nous convenait parfaitement. 

    Enfin là, je ne le sentais pas, mais alors pas du tout. Surtout quand Eden me rappela de prendre mon flingue. Vous savez ? Celui qui ne me quitte presque jamais… Là, c’était carrément flippant en fait…

     

    Je me préparai nerveusement, prenant plus d’armes que d’habitude. Si Eden était inquiète, nous étions doublement inquiètes. Enfin, quand je dis nous…

    — La reine arc-en-ciel a dit que tu dois être en forme, m’expliqua Lucy en me tendant un verre de jus d’orange.

     

    C’était sa façon de me soutenir. Je ne pouvais pas en demander plus de sa part, c’était déjà pas mal alors.

    J’avalai le verre d’une traite et partis m’asseoir dans un coin en attendant d’arriver à destination.

     

     

    Chapitre 3 : La balade de Lucy

     Sommaire

    La nuit tombait petit à petit et il s’était remis à pleuvoir. Très vite, mes cheveux se plaquèrent en longues lames glacées et dégoulinantes contre mon visage. Les rues étaient quasiment désertes.

     

    Chouette, comme ça si le meurtrier se pointait je ne pourrais pas le louper !  

     

    Je sursautai en me rendant compte que je dormais presque debout. En ouvrant les yeux, ce serait mieux !  

    J’avais l’impression de flotter, d’avancer dans une bulle instable, d’être bourrée, droguée, tout ce que tu veux mais pas dans mon état normal. Le temps semblait ralentir et un bref éclair de lucidité me traversa avant de sombrer.

     

    Ça recommençait… 

     

    Je me retournai et constatai deux choses : 

    1.Lucy avait disparu. 

    2.Je ne savais pas du tout où j’étais. 

     

    Ça m’apprendra à délirer toute seule pendant une mission. En plus, le cuir mouillé de mon manteau contre ma peau était tout sauf agréable. À ce train-là, le tueur aura largement le temps de torturer joyeusement Bidule Chouette, manger un morceau, l’achever, prendre une douche et regarder un épisode des frères Scott. 

    — Lucy !

     

    Ma voix tremblait tellement je grelottais. Ah ! J’avais l’air fière, moi la grande (sans blagues, je mesure 1m 75 !) et menaçante mercenaire ! 

    Bon, revoyons nos priorités : d’abord la mission, ensuite on récupère Lucy au passage. Je sortis le plan qu’Eden m’avait imprimé avant de partir (le truc dégoulinant et informe au fond de ma poche) et insultai la pluie qui se mit à tomber encore plus fort. Et merde.

    Je tentai de joindre Lucy sans trop y croire : elle n’avait jamais répondu au téléphone et c’était pas maintenant que se produirait un miracle !

     

    J’avais raison.  

     

    Je composai le numéro d’Eden, appréhendant le moment où elle me rappellerait que j’avais totalement foiré sur ce coup-là. Chose que je savais déjà, pas la peine de remuer le couteau dans la plaie. Le problème c’est que c’était la spécialité d’Eden, qui répondit à la première sonnerie.

    — C’est quoi l’adresse ?

    — Je te l’avais donnée.

    — C’est trop mouillé pour que je lise quoi que ce soit.

    —10 rue des Angelots. T’es où ?

    — Impasse Louis XIV.

    — T’es pas loin.

    — Et, euh….J’ai paumé Lucy.

     

    Cette fois-ci, ce fut moi qui raccrochai la première. Appelez ça comme vous voulez, moi j’appelle ça de la prudence. Ma patronne pouvait être terrifiante quand elle s’y mettait.

     

    Pas loin, pour Eden, signifiait « à moins de 10 km à la ronde », j’étais donc vachement aidée…

     

    J’avais comme l’impression que la mairie faisait des économies sur l’électricité en n’allumant qu’un lampadaire sur deux, ce qui donnait un air vraiment glauque aux rues, en plus, quelqu’un en rajoutait une couche en chantonnant tout doucement. Une voix de fille, assez nasillarde.

     

    Lucy ! 

     

    Elle était assise sur le perron d’une maison, emmitouflée dans son manteau trois fois trop grand et elle faisait des ronds à la surface d’une flaque d’eau avec un bâton. 

    Elle leva ses yeux aussi profonds que deux lacs et s’arrêta de chanter avant de se lever et d’épousseter machinalement la pluie sur ses fesses. Je remarquai alors le numéro de la maison. Le numéro 10.

     

    10 rue des Angelots.

     

    Chapitre 4 : Le repas du tueur

    Sommaire 

    Je n’étais pas loin du compte : le tueur avait pris son temps. Cette fois-ci, il avait dévoré en partie sa victime.

     

    L’homme, dont les vêtements avaient été arrachés pour faciliter l’accès à la chair, était allongé sur un tapis coûteux aux pieds d’un canapé beige sur lequel les tâches de sang ressortaient agressivement, les bras écartés de chaque côté de sorte à former une croix, vu de loin. J’en avais déduit qu’il y avait eu cannibalisme dès que j’avais vu qu’il manquait des morceaux  et les petits croissants qui se dessinaient sur les rebords, trop petits pour être d’origine canine. Un œil à l’iris verdâtre s’était délogé de l’orbite de son propriétaire et pendouillait joyeusement sur le côté…

     

    Et bon appétit bien sûr !

     

    Le cadavre était encore souple, trop frais, et inodore pour le moment. Les intestins n’avaient pas été perforés mais je pouvais les voir, baignant dans un liquide noirâtre, si je me penchais assez près.

     

    J’avais beau avoir vu des milliers de cadavres, je sentis les restes de pizza remonter et dus m’éloigner un peu pour respirer un bon coup.

    Je tuais toujours bien proprement les gens, et même en les amochant, ils ne ressemblaient pas à ce que j’avais sous les yeux. Un cadavre bien amoché ne ressemblait plus à rien, ce qui était bien utile quand on avait peu d’imagination. Mais là… on pouvait toujours voir de quoi il avait l’air de son vivant, voir qu’il s’agissait de quelque chose d’humain… et ces traces de dents…

    Rien qu’en y pensant, l’odeur du sang me parut plus forte. Tous mes sens semblaient surdéveloppés et je ne pouvais échapper à l’horreur de ce meurtre. Ma main agrippa la crosse de mon flingue pour me rassurer. J’avais peur, très peur. Celui qui avait fait ça était un malade capable de tout. Imprévisible. Je m’étais toujours retrouvée confrontée à des mafieux, des trafiquants de drogues, d’armes, des proxénètes, mais tous étaient encore « sains d’esprit », si j’ose dire. J’étais capable d’anticiper leurs actions, il y avait une certaine logique. Mais là… j’avais l’impression d’avancer dans le noir alors qu’à tout moment je pouvais tomber sur un psychopathe cannibale.

     

    Lucy regardait le cadavre calmement, comme si elle ne le voyait pas vraiment et je me mis à l’envier de vivre dans un autre monde. Elle était protégée et j’étais jalouse.

     

    Je vis quelque chose bouger près de la porte et mon cœur manqua un battement. Le tueur ! Il était encore dans l’appartement !

    — Reste là Lucy ! Et appelle Eden !

     

    Je m’élançai à la suite de l’homme qui courait dans les escaliers avec une seule pensée en tête : le tuer avant qu’il ne me tue. Si je le laissais filer maintenant il pourrait me prendre par surprise à tout moment et je n’osai même pas songer à ce qui m’attendrait si c’était le cas.

     

    Je regrettai d’avoir arrêté le sport il y a des années, au bout de 30 mètres et constatai que le tueur, lui, était en pleine forme. Malgré ça, je continuai à courir avec pour seul carburant la peur de ce qui pourrait arriver si je ne saisissais pas ma chance maintenant. Je m’arrêtai pour dégainer et tirai.

    Dans les films, les gentils réussissent toujours alors que les méchants ont eu leur permis de port d’arme dans une pochette surprise. Je savais que du point de vue de la justice, je n’étais pas si gentille que ça mais bordel, avec un psychopathe face à moi, je ne faisais pas le poids !

     

    L’homme, indemne, zigzaguait maintenant et je tirai à plusieurs reprises. À défaut d’avoir de la chance, j’étais une excellente tireuse… qui ne réussit qu’à érafler le bras du type.

    Je jurai et me remis à courir mais le temps que je m’étais arrêtée lui avait permis de mettre encore plus de distance entre nous et je le perdis au tournant d’une rue.

     

    Je m’arrêtai et repris mon souffle, crachant à moitié mes poumons. Une fois les battements de mon cœur calmés, je me rendis compte que la pluie était toujours aussi froide. Une voiture passa devant moi et m’aurait renversée si je n’avais pas fait un bond sur le côté. Je réalisai que telle était son intention quand il fit marche arrière dans ma direction. Je n’avais pas le temps de me relever et rampai vers l’entrée la plus proche pour m’y mettre à l’abri.

    Au moment où la voiture partit réellement, ma mémoire imprima en gros caractère dans mon cerveau chaque lettre de sa plaque d’immatriculation.

     

     

     

     

     

    Chapitre 5 : Twilight 36, Récupération

     Sommaire

    Appeler une femme célibataire « madame » était toujours vexant pour la femme en question mais ici, c’était une preuve de respect. Malgré ses cheveux multicolores, Eden bénéficiait d’une autorité naturelle, ce qui lui avait ouvert bien des portes et valu mon respect lors de notre rencontre. Au fond de moi, j’avais tout de suite vu en elle quelqu’un qu’il valait mieux ne pas sous-estimer. Je ne l’avais jamais vue à l’action mais, d’un côté, même si je ne savais pas pourquoi, je ne le voulais pas. Peut-être un quelconque instinct de survie.

    Elle acquiesça auprès des trois inconnus et s’adressa à moi d’une voix autoritaire.

    — Va dehors, Kaelle.

     

    Je ne compris pas tout de suite la raison de cet ordre. J’avais bien le droit de savoir ce qu’il se tramait, non ?

    Ce ne fut que lorsqu’elle ajouta « et emmène Lucy avec toi » que j’esquissai un sourire à peine perceptible et obéit.

     

    Eden avait beau avoir une autorité naturelle incontestable, quiconque prenait Lucy à côté de soi pendant un entretien perdait toute crédibilité en moins d’une demi-

    seconde. Elle pouvait toujours amadouer les clients avec un air désolé et un « c’est ma nièce, elle est née avec une grave maladie mentale et personne ne veut s’occuper d’elle », mais je ne pensais pas que ces derniers demanderaient un second rendez-vous. Je pris Lucy par la main et l’emmenai à l’extérieur  du bâtiment. C’était un de ces trucs modernes tapissés de miroirs sans tain (il parait que les pièces étaient plus lumineuses avec, tout en conservant un minimum d’intimité) qui s’élevait très très haut. Pour faire simple, afin de voir le sommet j’étais obligée de reculer de quelques mètres et de me dévisser la tête, quitte à avoir un torticolis.

     

    Lorsqu’Eden en sortit, je me tournai vers elle en lui posant silencieusement la question qui tournait dans ma tête depuis un petit bout de temps. Bon, bon, j’avoue, elle était là depuis que j’avais découvert le prêtre assassiné, mais pour ma défense je dirais qu’à ce moment-là c’était à peine un embryon de question.

    Eden nous dépassa sans rien dire, très sérieuse malgré son look peu orthodoxe et Lucy me prit la main, sentant elle aussi que l’ambiance n’était pas aux blagues, aussi mauvaises soient elles. Nous la suivîmes en silence jusqu’au camion qui nous servait de demeure et ce ne fut que lorsqu’elle s’installa derrière son volant chéri que je tentai un :

    — Alors ?

     

    Je la sentais anormalement nerveuse. Elle s’adossa au siège et passa une main dans ses mèches folles pour se calmer.

    — Alors nos employeurs font partie d’un groupe de recherche en génétique appelé Harmony. Il a été démantelé par manques de moyens l’année dernière mais il y a quelques mois, un des chercheurs à découvert ce qui pourrait mener à l’aboutissement de leur projet. L’homme que tu as vu dans l’appartement appartient à une société concurrente qui veut mettre la main à tout prix sur la découverte avant eux.

     

    Ça ressemblait quand même à de la science-fiction…

    — Et pour la suite ?

    —À la base, ce projet devait rester secret. C’est pour cela qu’ils nous avaient contactés, parce que notre boulot habituel n’est pas dans la récupération. Au contraire.

    — Oui mais je crois bien que pour la discrétion, c’est foutu, là, non ?

    — Ils veulent qu’il y ait quand même un minimum de personnes au courant, donc nous continuerons à récupérer des chercheurs pour eux, en échange, ils nous paieront en conséquence.

     

    J’acquiesçai sans un mot et méditai sur ce que je venais d’apprendre. La voix d’Eden s’éleva et je n’y perçus aucune émotion, juste ce ton professionnel qu’elle savait si bien adopter et qui me donnait froid dans le dos (pourtant, j’étais une tueuse pure et dure, mais je n’avais jamais entendu quelqu’un d’autre vider aussi bien sa voix de tout sentiment).

    — Tu as effacé vos empreintes ?

    — Oui.

     

    Comme tu me l’as appris, me retins-je de dire.

    — Tu as ramassé les douilles ?

    — J’ai tout ramassé.

    —Bien.

     

    Je revis les marques de dents, l’œil qui me fixait hors de son orbite, les entrailles baignant dans une bouillie immonde et frissonnai. Ce n’était pas une simple course au prix Nobel, ça.

    — Franchement, ça sent mauvais.

    — Je sais.

     

    Je sus cette fois ci que c’était ça qui la rendait nerveuse.

     

    — On ne bouffe pas les gens pour un prix Nobel.

    — Je sais.

     

    Mais nous n’étions pas là pour juger, juste pour exécuter les ordres en fonction du prix.

    Lucy s’était endormie et quelque chose me disait qu’elle se fichait totalement de la situation puisque ce genre de choses n’existait pas dans son monde. Sur la petite table à côté d’elle, je repérai le petit carnet brun « emprunté » chez le prêtre dont le nom, au final, m’importait peu. Je me levai et soupirai. Dans quoi m’étais-je embarquée ?

     

    Eden se leva et me tendit une feuille.

    — Voilà la liste des gens à récupérer. On commence demain.

     

    La cible la plus proche était une femme. Eden et moi avions décidé qu’il était plus sûr que je ne parte jamais seule, même si Lucy n’était pas dispo H24. Elle savait abattre une cible de sang-froid et ça me suffisait.

     

    J’avais noté le numéro de la plaque d’immatriculation de la voiture du présumé assassin sur un bout de papier et demandé à Eden de faire des recherches pour « vérifier » les dires des dirigeants d’Harmony. Toute cette histoire était vraiment trop bizarre, ça puait et j’étais presque sûre et certaine que cette entreprise nous cachait quelque chose de pas catholique.

    Il ne pleuvait pas mais il y avait du vent, l’automne était l’une des saisons les plus instables, passant d’un temps de chien à un autre, elle me rendait nostalgique tout simplement parce qu’elle symbolisait tout ce que j’avais vécu. Avant…

     

    Je me repris. Pas question de louper mon coup cette fois ci ! Lucy marchait (/flânait) à côté de moi et je ne pus m’empêcher de repenser à ce moment, dans le camion, où je parlais avec Eden de la prochaine opération récupération –celle-ci donc- et des diverses tactiques pour éviter de la foirer (« encore », merci de ne pas le préciser...), Lucy avait semblé revenir à elle.

    — Quelle adresse ? Avait-elle demandé, neutre.

     

     

    J’étais tellement surprise qu’elle dise un truc qui ai un rapport avec ce  dont nous discutions que j’avais dû lui demander de répéter.

    — Quelle adresse ?

     

    Je la lui avais donnée, toujours sous le choc. Après réflexion j’y avais vu le côté pratique : Lucy était un vrai GPS ambulant contrairement à moi qui passait les trois quarts des missions à chercher mon chemin (« bonjour, je suis mercenaire et je cherche la maison d’un trafiquant de drogue que je dois liquider, vous ne sauriez pas où il est, par hasard ? »). Pourquoi n’y avais-je pas pensé avant ?

     

    Bref bref, toujours est-il que c’était la première fois que je la voyais lucide quelques instants. À mon avis, cette affaire l’avait aussi marquée.

     

    Je m’arrêtai. Droite ou gauche ? Lucy me dépassa et continua droit devant elle. Bon eh bien il n’y avait plus qu’à la suivre et… C’est moi ou les murs tournaient ?

     

    Je m’appuyais contre un lampadaire et me rendis compte que mes jambes avaient du mal à me porter, ma vue se brouilla quelques secondes et, l’instant d’après, tout était redevenu normal.

     

    Étrange.

     

    Lucy était loin, elle n’avait pas pris la peine de s’arrêter, je crois même qu’elle n’avait rien remarqué du tout.  Je pressai le pas pour la rattraper et surpris un léger froncement de sourcil lorsqu’elle me vit, comme si elle ne s’attendait pas à me voir à côté d’elle. Ce genre de brusque prise de conscience des gens qui l’entouraient lui arrivait souvent, mais j’étais bien aidée si le tueur débarquait et qu’elle ne le remarquait même pas !

     

    Elle s’arrêta devant une villa bien proprette et sonna. J’observai les murs d’un blanc immaculé, les grandes baies vitrées et les meubles coûteux qu’on apercevait à l’intérieur. Je ne crois pas que je m’attarderais beaucoup ici. Ce genre de maisons de bourges avait tendance à me filer de l’urticaire. Si si ! Je vous jure ! J’ai des plaques qui me couvraient tout le corps et qui ne partaient que lorsque je sortais de la maison ! Enfin, un truc comme ça…

     

    Une grande femme blonde, totalement en accord avec le style de la villa, vint nous ouvrir. Je fus surprise d’abord et balbutiai :

    — Mme Novelan ? Megan Novelan ?

    — Oui c’est moi. Qu’est-ce que vous voulez ?

     

    Oh petit Jésus si tu existes merciiiii !!!

     

     

     

    Chapitre 6 : Négociation avec renfort de lapins

    Sommaire 

    Elle était vivante ! La cible était encore vivante quand on était arrivées ! Bon sang j’avais du mal à ne pas danser la gigue là devant sa maison de riche qui me sortait par les yeux !

     

    Je repris contenance et annonçai la couleur.

    — Nous avons été employées par Harmony afin de vous mettre en sûreté.

     

    La femme blêmit. Bon (ou plutôt « pas bon »), apparemment elle n’en avait pas un très bon souvenir.

    — Allez-vous en d’ici. Je n’ai plus rien à faire avec Harmony.

     

    Elle tenta de nous claquer la porte au nez mais je parvins à la bloquer en sacrifiant mon pied qui, j’en suis sûre, devait être très reconnaissant envers mes chaussures renforcées (en tout cas moi je l’étais). Ce mouvement dégagea mon flanc droit, exposant un de mes flingues aux regards, ici, le sien. Et merde…

     

    Je crus bien qu’elle allait nous faire un malaise, ce qui d’un côté m’aurait bien arrangée. J’aurais pu la traîner jusqu’au camion avec Lucy sans avoir à négocier.

    — écoutez bien, Madame, un malade traîne dans les parages et s’amuse à dévorer les anciens employés d’Harmony. Je marquai un temps de pause afin de bien placer un petit effet dramatique. Vous êtes la première personne que je n’ai pas retrouvée morte jusque-là.

     

    Ça y est, elle allait nous le faire son malaise ! Non ? En tout cas elle ouvrit la porte et s’y appuya. Je crois que ça faisait trop d’informations à digérer pour son pauvre petit mental fragile… Oui je n’aimais pas les gens riches qui se prenaient pour ce qu’ils n’étaient pas et alors ?

    — M… Morts ?

     

    Je restai professionnelle.

    — Oui. Je ne tiens pas à préciser dans quel état je les ai retrouvés.

     

    Elle passa une main dans ses cheveux impeccables en soupirant.

    — Savez-vous ce qu’Harmony fait ?

    — Des recherches en génétique.

     

    Elle eut un de ces petits sourires que je n’aime pas voir chez les gens. Du genre : « ma pauvre fille, tu ne connais rien à la vie ». J’étais mercenaire ! Si quelqu’un devait s’y connaître en matière de réalité qui choque c’était bien moi !

    Le regard perdu dans le vague, elle continua.

    — Vous ne savez rien des travaux d’Harmony…  Aux yeux de tout le monde, ils travaillent sur diverses méthodes pour guérir certaines maladies.

    — Et en réalité ?

     

    Elle ne répondit pas et son regard se voila et je soupirai.

    — Si vous ne venez pas, vous mourrez dans d’atroces souffrances. Ce ne sont pas des menaces. Les précédentes victimes étaient…

     

    Crucifiées, dévorées, torturées… Je retins tous ces mots et proposai un compromis.

    — Laissez-moi au moins vous mettre en lieux sûrs le temps que j’en discute avec ma patronne.

     

    Elle hésita. Quoi, il lui fallait des photos des meurtres pour qu’elle se rende compte qu’un malade mental traînait dans les parages !?

    — D’accord.

     

    Je fus soulagée. J’allais enfin pouvoir la ramener. Non pas que la perspective que le tueur puisse débarquer pendant notre petite négociation me fasse peur… Quoique…

    Lucy choisit ce moment-là pour se manifester en s’accroupissant et en tendant la main vers une bestiole invisible.

    — Lapin… Tss tss. Viens petit lapin…

     

    Elle se tourna vers nous et chuchota sur le ton de la confidence :

    — Dès qu’il se rapproche, il faudra lui donner un grand coup sur la tête pour le tuer.

     

    On n’était pas sorties de l’auberge !

     

     

     

     

    Chapitre 7 : La voix

     Sommaire

    — Qu’est-ce qu’on fait ?

     

    Eden mâchouillait la paille, maintenant hors d’usage, de son soda, le regard perdu dans le vide. C’était bon signe, elle était en train de faire appel à son bon sens. Ou pas.

    Nous n’avions jamais été confrontées à une telle situation et je ne pouvais prédire aucun comportement de mes coéquipières. C’est bizarre, avant, quand nous étions plus nombreux, j’arrivais à prévoir celui de quelques-uns de nos partenaires. Bon, je n’avais pas vu arriver leur départ, mais je pouvais leur faire… Confiance…

    Est-ce que je ne faisais pas confiance à Eden puisque je ne savais pas du tout comment elle allait réagir ? Je pense que non, elle prenait toujours la bonne décision pour nous.

    D’un regard je vérifiais que Lucy n’importunait pas la grande blond(asse… désolée, c’est plus fort que moi). Cette dernière semblait (pas) s’accommoder à notre charmant petit chez-nous et, malgré la situation, voir une de ces riches dans un milieu aussi peu approprié me faisait vraiment marrer. 

    Je revins vers ma patronne qui fixait un point imaginaire.

    — Va chercher les autres de la liste.

     

    C’était pas bon. Eden hésitait. Elle hésitait bordel ! On avançait à l’aveuglette ! Eden réagis ! Bon d’accord, la flingueuse c’était moi, mais je n’étais pas un monstre pour autant. J’y avais cru un moment, m’y étais fait même, mais finalement non. Je ne pouvais pas.  Et je crois qu’Eden le sentait puisqu’elle se tourna vers moi avec ce regard autoritaire qui me donnait des frissons de terreur et était susceptible de hanter mes nuits.

    — Va chercher le suivant.

     

    Je me levai et appelai Lucy qui jouait avec je-ne-sais-quoi par terre.

    — Réfléchis-y bien Eden.

     

    Je m’emparai de la liste à côté de mon café sûrement froid et repérai le suivant. Un homme. Pour (pas) changer. J’ingurgitais ma dose de caféine froide, grimaçai, et sortis avec Lucy sur mes talons.

     

    Je n’étais pas près de chez lui pour une fois et je dû me repérer sur le plan d’un arrêt de bus. Bon, bon, si je prends le bus à cet arrêt jusqu’à celui des Augustins et en faisant correspondance avec le... hum… 8. Voyons, j’y serais d’ici au moins vingt minutes.

     

    Mes idées étaient confuses, s’embrouillaient dans ma tête et je manquai d’entrer dans le bus sans payer, perdue dans mes réflexions, ou du moins, dans la tornade qui me servait d’esprit.

    De vieux souvenirs firent surface, se mélangeant aux autres. Tout ça me donnait mal au ventre.

     

    Je me laissai bercer par le chantonnement de Lucy et regardai le paysage défiler, mes yeux avaient tendance à se fermer tous seuls mais je résistai et trouvai la force de descendre au bon arrêt. La correspondance n’était pas loin et j’eu du mal à avancer dans l’allée lorsqu’il démarra. Une simple perte d’équilibre. La fatigue qui s’accumulait peut être.

     

    Vas-tu à nouveau servir d’objet de corruption ?

     

    Quoi ?

     

    Vas-tu à nouveau faire des choses contre ton gré ?

     

    Non, bien évidement. Mais Eden avait dit que….Et puis c’était quoi ce délire de voix dans ma tête ???

     

    Une bourrasque d’air froid me fit revenir à moi. J’étais descendue du bus mais je ne m’étais pas éloignée de l’arrêt. Le vent faisait plier les arbres mais je crevais de chaud.

     

    As-tu oublié ta promesse ?

     

    Je m’adossai à l’arrêt et fermai yeux un instant, juste un instant. Peut-être que quand je les rouvrirais je me sentirais mieux…

     

     

     

    Chapitre 8 : Un joli bouquet pour orner les tombes

     Sommaire

    J’étais devant le cadavre, horrible, comme les autres.

     

    Comment étais je arrivée là ??!!

     

    Ma respiration s’accéléra, je reculai d’un pas et portai mes mains à mon visage… pleines de sang.

     

    Ne pas paniquer, ne pas paniquer… Bordel c’est quoi ce truc ?!

    — Lu… Lucy… Qu’est-ce qu’il s’est passé ? Lucy ?

     

    Je la cherchai un instant et la trouvai dans un coin en train de se balancer en chantonnant.

    — Lucy ?

     

    Elle leva les yeux vers moi et je sus qu’elle n’était plus avec nous.

     

    Le type était éventré, comme l’autre. Il lui manquait les deux yeux, sa langue portait de petites traces de morsures, l’arc indiquant que ça n’était pas lui qui s’était fait ça. Son crâne était à moitié défoncé, je cherchai autour de moi ce qui aurait pu faire ça et trouvai une barre de fer. Ce fut seulement maintenant que je me rendis compte que nous étions dans une serre et que le type écrasait des fleurs très colorées. Il avait été frappé très fort avec la barre, je remarquai que les fleurs à côté étaient aussi écrasées, la largeur correspondait à celle du corps du type. Il était tombé sur le ventre et on l’avait retourné… Quelle taille faisait-il ? 1m80 ? 90 ? Il était sans doute plus grand que moi. Etait-il agenouillé alors au moment du meurtre ? L’avais-je tué ?

     

    Je me passai les doigts dans les cheveux et tentai de reprendre mon calme. Je ne savais pas ce que j’avais fait ces… Combien de temps s’était-il écoulé au juste ? Mon portable affichait deux appels manqués. Eden. J’avais été absente plus de 3 heures… Merde.

     

    Je rentrai mes mains dans mes manches et sortis un mouchoir de ma poche. Je ne savais pas si c’était moi, mais dans le doute il valait mieux tout effacer. J’essuyai la barre qui avait sans doute servi à lui défoncer le crâne, traînai le corps jusqu’à… Non, à ce stade là il valait mieux tout brûler. Trop de preuves. Je devrais aussi faire attention en partant. Lucy et moi étions couvertes de sang. Merde ! Merde ! Merde !

     

    Je composai le numéro d’Eden en m’efforçant de ne pas craquer.

    — Kaelle ? Qu’est-ce que t’as foutu ?

    — J’en sais rien….. Tu...Tu pourrais nous récupérer ?

    — Tu y es allée en bus, tu ne peux pas faire le retour ? demanda-t-elle d’un ton ironique.

    — C’est une longue histoire…

     

    Je levai les yeux vers le plafond. Il faudra que je débranche l’arrivée d’eau.

     

    Lorsqu’Eden arriva, une demi-heure plus tard, la serre commençait à prendre feu. J’avais enlevé nos chaussures à Lucy et moi, afin d’éviter de laisser toute empreinte suspecte à l’extérieur. J’entrai en quatrième vitesse dans le camion et la première chose que je fis fut d’enlever mon débardeur poisseux. La blond(asse) écarquilla les yeux et je ne sus jamais si c’était parce que j’étais couverte de sang ou parce que je me retrouvais en soutien-gorge alors qu’on était entre filles.

    — J’espère que tu as une bonne excuse… gronda ma patronne.

     

    J’optais pour la carte de la franchise.

    — J’en sais rien du tout.

    — Et Lucy ?

     

    La petite blonde leva les yeux vers elle.

    — Il y avait de très jolies fleurs. Les lapins aiment les fleurs, ça ferait un très bon piège !

     

    Eden avait démarré histoire d’être loin quand les pompiers débarqueraient. Moi je tentais de me débarrasser de tout ce sang sans en foutre partout. J’étais pas du tout, mais alors pas du tout dans mon assiette.

    — Ecoute Eden, c’est la première fois que ce genre de truc m’arrive, j’ai fermé les yeux parce que je me sentais pas bien et quand je les ai rouverts j’étais là-bas.

     

    Eden poussa un gros soupir et, pour une fois, se concentra sur la route. C’était sa manière de s’isoler pour se calmer. Je m’enfermais dans la douche et manquai de m’ébouillanter en allumant l’eau chaude. En fait, j’avais menti. Ce n’était pas la première fois que j’avais des absences… mais ça faisait si longtemps…… Et cette voix…

     

     

     

     

    Chapitre 9 : « Et même que moi des fois, ze vomiis ! »

     Sommaire

    La radio crachota un grésillement, Eden tapa deux coups dessus mais dut quand même attendre la fin du tunnel pour que le bulletin d’information reprenne.

     

    Cela faisait plus d’une semaine que les morts s’enchaînaient, à commencer par le curé Machin, et toujours rien dessus. Quelqu’un étouffait l’affaire et bien même !

     

    La dernière personne que j’aurais dû aller chercher n’avait pas voulu venir, je m’étais à nouveau sentie bizarre mais j’avais eu le temps de voir le type s’éloigner de nous sur la route et se faire faucher par une voiture. C’était con… Très con… La mort la plus con de toute cette affaire même ! Non mais franchement, ce type avait échappé au tueur et au final il s’était fait renverser !

     

    Enfin, il se pourrait que ce ne soit pas un simple accident…

    Et toujours rien aux informations… Ça nous rendait nerveuses. Tellement qu’Eden avait d’ailleurs décidé de garder la blond(asse) avec nous ! Au cas où…

    Cette dernière ne cessait de psychoter sur Harmony en disant que c’était eux qui étouffaient l’affaire et que, dès qu’ils auraient ce qu’ils voulaient, ils nous tueraient tous, mais n’avait toujours pas avoué ce qu’ils faisaient dans leurs laboratoires. Elle le répétait tellement que j’avais fini par me demander si, au fond, elle n’avait pas raison, et surtout, où était ce putain de bouton « off » sur elle ! Comme si on n’était déjà pas assez nerveuses comme ça, elle en rajoutait une couche dès qu’elle ouvrait la bouche !

     

    Chiche au prochain arrêt on la laisse sur la route !

     

    Décider de qui partait chercher le prochain type avait été plus dur qu’on l’aurait cru. D’une part, moi avec mes absences bizarres (et la voix dans ma tête mais ça, personne n’est au courant alors bouclez-la), de l’autre Lucy... Eh ben c’était Lucy quoi !   

     

    On ne pouvait m’envoyer toute seul, il fallait quelqu’un de responsable avec moi, mais il fallait aussi quelqu’un de responsable pour garder Lucy, or Eden ne pouvait pas se dédoubler (pas encore, mais ça ne m’étonnerait pas qu’elle y arrive un jour) et on ne pouvait décemment pas emmener blondie avec nous ni la laisser seule au camion. Finalement, il fut décidé qu’Eden irait avec moi, laissant Lucy avec blondie. C’était la meilleure alternative même si j’avais très envie de lui faire remarquer qu’entre laisser Lucy seule ou avec la blond(asse) il n’y avait aucune différence.         

     

    Travailler sur le terrain avec Eden était nouveau et… économique… Economie de mots, économie de temps, économie de gestes. On ne gardait que l’essentiel. Pour finalement retomber sur un cadavre… Allez, voyons le côté positif ! Je n’avais pas eu d’absence !

    Une chose me sauta à la figure, et pas des moindres. Elle ne fit pas le même effet à Eden mais comme je lui avais décrit fidèlement les scènes de crime elle avait une idée approximative de ce qui clochait ici et que je n’osais pas formuler.

    — Le corps n’est pas comme les précédents.

    — Il est comme celui du prêtre, confirmai-je.

     

    Sauf qu’il était à un stade de décomposition avancé et je me demandais comment les voisins ne l’avaient pas encore remarqué vu l’odeur et les fluides qui s’en échappaient. Je repérai les clous qui maintenaient la femme dans une vague position de crucifiée ainsi que les bestioles grouillant un peu partout. J’élargis mon champ de vision et repérai des détails infimes indiquant que l’appartement avait été fouillé. Depuis combien de temps était-elle là ? Un mois ? Deux mois ? Trois ? Une chose était sûre : la manière d’opérer était la même que pour le prêtre Machin, le tueur n’avait ni évolué, ni eut plus ou moins de temps. Ce qui voulait dire que…

    — Eden…

     

    Je n’osais pas formuler ma phrase. Je crois bien que je craignais les conséquences que ça impliquait.

    — Foutons le camp d’ici. On parlera plus tard. 

     

    Très bonne idée. L’odeur était vraiment infecte et certainement responsable de ma nausée. J’avais l’impression qu’il faisait très chaud aussi. Mais peut-être n’était ce qu’une impression.

     

    L’air frais me ramena à la réalité, moi et mon estomac qui avait survécu jusque-là en se disant que tout ça n’était pas réel. Résultat, il rendit tout ce que j’avais bien pu avaler depuis ce matin. Eden était restée à côté de moi, soutien stoïque pour me rappeler sa supériorité dans sa capacité à supporter toute sorte d’horreurs parce que elle, elle n’avait pas vomi… c’était pour ça que c’était elle la chef non ? Parce qu’elle ne vomissait pas…

    — Eden… retentai-je. Je crois qu’on a deux tueurs.

     

    Pause. Arrêt sur image. J’explique mon raisonnement.

     

    Le prêtre et la fille que nous venions de voir avaient été torturés et on avait fouillé chez eux. CA ça pouvait être l’œuvre d’un concurrent d’Harmony ou d’Harmony elle-même, à la recherche de leurs travaux. CA c’était plus crédible ! Pas le truc horrible voire carrément gore, sur lequel je tombais ces derniers temps !

     

    Maintenant il y avait deux options : le second tueur, le psychopathe qui bouffait les gens, en avait soit après Harmony et ses employés, soit après nos clients en général. Si cette dernière option se révélait vraie, on était dans la merde…

     

    Fin de la pause. Retour à la réalité.

     

    Eden avait froncé les sourcils et s’était plongée dans un mutisme qui traduisait une cogitation intense. Quel beau duo : la patronne aux cheveux multicolores en intense réflexion et moi ; le stéréotype de la bad girl, à moitié penchée en train de dégueuler tout ce que je pouvais….

     

    Positiver, positiver… L’autre duo de blondes dans le camion n’était sûrement pas mieux… Ça c’était du positif !

    Une vision apocalyptique du camion s’imposa à moi et je crois bien que je me sentis encore plus malade.

     

     

     

    Chapitre 10 : Eden c’est Chuck Noris

     Sommaire

    Je sentis plus que je n’entendis la balle siffler près de mon oreille. Eden jura et plongea en m’entraînant avec elle.

    J’étais encore toute engourdie, sous le choc et je me sentais terriblement lente et maladroite à côté de ma patronne dont chaque mouvement, parfaitement calculé pour ne garder que toute son efficacité (économie ! économie je vous dis !), ne durait pas plus d’une demie seconde.

    — La voiture noire, là-bas, m’indiqua-t-elle.

     

    La voiture noire ? Quelle voiture noire ? Je venais seulement de repérer la BMW noire, trente mètres derrière nous où s’entassaient quatre hommes en costume noirs, armés. Il fallait que je me réveille un peu plus si je voulais rester vivante !

     

    Tout me paraissait irréel : deux tueurs, un malade mental, la voix dans ma tête, le corps en décomposition, les travaux en génétique…

     

    Tu n’en peux plus ?

     

    J’en sais rien. C’est pas le moment de réfléchir…

     

    Tu t’étais promis que tout serait plus facile maintenant…

     

    La ferme…

     

    La main ferme d’Eden me sortit de ma torpeur.

    — Bouge ! me cria-t-elle, flingue à la main, tirant sur les types.

     

    Et là seulement, je réagis. Mon corps se tendit et je bondis en avant, dégainant à mon tour pour riposter. Le vide envahit lentement mon cerveau jusqu’à ce que je devienne cette tueuse au sang-froid qu’Eden avait formée. Plus de sentiments, plus de doutes, plus rien. Juste les balles qui se plantaient dans le décor autours de nous.

     

    Nous détalâmes comme si nous avions le diable aux trousses, ce qui n’était pas faux parce qu’au vu de nos actions passées, notre mort nous mènerait tout droit en enfer. Bref, je tournai la tête pour éviter de tirer au hasard et, le temps que je regarde à nouveau devant moi un autre costard cravate à la « men in black » me barrait le chemin et je le heurtai de plein fouet.

     

    Nous étions tous les deux étourdis, tout me semblait marcher au ralenti autour de moi mais je savais que ce n’était qu’une impression.

    Me relever avant lui… Le tuer avant qu’il puisse le faire. C’était une lutte contre les petites étoiles qui dansaient devant mes yeux, celui qui perdait mourrait.

     

    Manque de bol pour lui, j’avais Eden près de moi, le chargeur vide, certes, mais elle lui planta son poing dans la figure, si fort que sa tête cogna contre le bitume et qu’il perdit conscience. Mort ? Peut-être pas.  Ah, si, maintenant qu’Eden lui avait saisi le crâne pour lui exploser par terre, il devait l’être maintenant.

     

    Et après ? Courir.

     

    J’avais mal suite à ma chute mais c’était comme si l’adrénaline m’anesthésiait et me dopait pour que j’aille toujours plus vite. Je levai les yeux.

    — Eden ! Le bus !

     

    Miracle ! Jésus était avec nous ! Promis, si je m’en sortais vivante j’essayerais d’aller à la messe une fois. J’ai bien dis « j’essayerais » hein.

     

    Le chauffeur de bus blêmit en nous voyant monter, essoufflées, armes au poing. Eden le « rassura » rapidement et le reste des passagers ne broncha pas, sans doute à cause de deux choses :

                - La politesse et ce détachement qu’ont les gens dehors, comme quand on agonise en pleine rue et que, bizarrement, personne ne vous remarque.

                - La peur qu’on le flingue, tout simplement. Les philosophes ont beau dire que l’Homme n’a aucun instinct de survie, des fois il revient au galop !

     

    Je m’affalai sur un siège en reprenant mon souffle à côté d’Eden. J’avais soudainement très chaud, je tremblais comme une feuille, et je dû m’y prendre à trois fois avant de pouvoir remettre mon flingue dans son holster. Eden pencha la tête en arrière et je ne pus m’empêcher de regarder l’arc en ciel que décrivit sa chevelure.

    — Un point positif. Tentais-je. Ce n’étaient certainement pas ces types qui bouffaient les gens ces derniers temps.

     

    Pas de réponse.

     

    Je lui jetai un regard et mon sang se glaça. Eden, notre pilier fort et sûr, était blême. Les mèches roses et vertes tranchaient sa peau, les couleurs me parurent brusquement trop vives pour ce visage fantomatique. Eden subissait aussi le contre coup de notre virée et soudain je me rendis compte qu’elle n’avait pas vu de cadavre en aussi mauvais état depuis trop longtemps pour pouvoir le supporter. Elle pouvait toujours tuer de sang-froid, ça je n’en doutais pas, mais tout comme la première fois que j’avais découvert le corps de Machin, bouffé, elle n’était pas habituée à ÇA.

     

    Elle soupira et se prit la tête entre les mains. Toute personne ne la connaissant pas aurait eu ce geste anodin, mais totalement suicidaire dans son cas, de la réconforter en lui posant une main sur l’épaule. Le truc c’était qu’il fallait faire comme si de rien était, comme si je n’avais jamais rien remarqué de cette faiblesse.

     

    Lorsque nous descendîmes du bus elle était à nouveau fraîche et dispo, plus que jamais prête à affronter la situation. 

     

     

     

    Chapitre 11 : L’apocalypse

     Sommaire

    Le chaos. Le Chaos. Le CHAOS. Le CHA-OS…

      

    Il n’y avait pas d’intonation exacte pour décrire l’état dans lequel nous retrouvâmes le camion. Au début, j’ai même cru que Lucy et notre chère et tendre blond(asse) avaient été attaquées en notre absence, mais elles étaient intactes, et, au vues de leur état, je me dis que finalement, ça aurait pu être bien pire…

     

    Eden n’avait pas réagi. Pas encore. Elle jaugea stoïquement Lucy et l’autre p…… bon, ok je me calme ! Je me calme ! Je me… 

    — Bordel mais c’est quoi ça ?! explosai-je.

     

    Eden haussa les épaules et répondit calmement en éteignant une petite braise encore fumante  sur le mur salement amoché. 

    — C’était le risque… 

    — Mais… Mais… 

    — J’en étais parfaitement consciente, mais la mission était plus importante.

    — Important... gloussa l’autre conne.  Comme si c’était vital ! Chercher des scientifiques pour aider des nazis, c’est important selon vous ?! Vous me faites rire ! Hahahahaha !

     

    Okaayyyyy, elle avait sérieusement tapé dans la réserve de Lucy, elle, mais puisqu’on y était, qu’elle nous en dise plus sur ces nazis…

     

    Eden fut plus rapide que moi.

    — Harmony est dirigée par des nazis ?

     

    L’autre se figea et sembla hésiter en se dandinant, puis manqua de tomber.

    — Au début, non, enfin, ça n’influençait pas sur les recherches qu’on effectuait. Et puis l’entreprise s’est associée à d’étranges personnes qui ont commencé à financer des recherches proches de celles effectuées lors de la seconde guerre mondiale et… Elle marqua un temps de pause et explosa de rire. Et vous gobez tout ce que je vous raconte !

     

    Et ma main dans sa figure, elle allait le gober ?!

    J’ouvrai la bouche pour la rappeler à l’ordre…

    C’était quoi encore son prénom ?

    — Ce n’est pas le moment de se moquer de nous blondie, l’heure est grave !

    — Kaelle, ça ne sert à rien, elle est sous l’emprise de drogues.

    — C’est la seule à pouvoir nous dire ce qu’il se passe, putain !

     

    Et là je me rappelai à qui je parlais… Oups !

    Alerte ! Alerte ! Il me faut une diversion ! Un autre sujet !

    — Qu’est-ce qu’on fait alors ? demandai-je en cherchant Lucy des yeux avant de la trouver dans l’armoire, les yeux écarquillés et prise d’un incontrôlable fou rire.

     

    — Monsieur Lapin est un traitre, chantonnait-elle. Monsieur Lapin mérite une punition. Monsieur Lapin doit être pendu.

    — Ouiiiii ! Pendu ! renchérit la blond(asse).

    — Eh ben, elles sont dans un putain de sacré délire ! commentai-je.

    — Il faut faire disparaitre le camion, lâcha ma patronne.

     

    Je stoppai net ce que j’étais en train de faire et ne pus m’empêcher de la regarder comme si une seconde tête avait poussé.

    — Toi aussi t’es dans un putain de sacré délire !

     

    Elle ne répondit pas, se contentant de me lâcher un regard blasé en rassemblant quelques affaires.

    — Ils ne tarderont pas à nous trouver pour nous éliminer, et le camion est en trop mauvais état de toute façon. Prends le strict minimum et file-moi un coup de main.

     

    Je restai quelques instants à la fixer, réalisant tout ce que cela impliquait.

     

    À vrai dire, cela me fendait le cœur.

     

    Ce n’était pas comme si on allait vivre dans un nouveau camion, non, c’était autre chose.

    Nous étions à la rue, toutes les trois (l’autre bourge ne comptait pas bien sûr !).

     

    À la rue ? Cela ne te rappelle pas quelques souvenirs ?

     

    — Si… Et c’était de ta faute… grommelai-je doucement.

    — Kaelle, bouge-toi !

     

    Je rassemblai quelques affaires, le strict minimum côté fringues et toute mon artillerie avant de préparer celles de Lucy qui n’était décidément pas en état de faire quoi que ce soit.

    J’avais trouvé refuge auprès d’Eden. Les logements de ma patronne étaient mes seuls foyers depuis… Depuis……

     

    Allez dis-le ! Tu sais très bien ce qu’il s’est passé ! N’aie pas honte !

     

    Crève !

     

    Serrant la mâchoire, je trainai ma coéquipière hors du camion.

    C’était pas la mort, non ? On avait vécu des trucs plus durs ! Alors ce n’était pas la peine de pleurer comme une mioche de quatre ans !

    Respirant un grand coup, je tentai de me calmer.

    Je crois bien que mes nerfs étaient mis à trop rude épreuve en ce moment, mais je repousserai mes limites. Il FALLAIT que je les repousse.

    Sinon nous étions toutes mortes.

     

     

     

     

     

     

    Chapitre 12 : à la base c'était le chapitre 13 mais je me suis plantée... la poisse

     Sommaire

    Etre dans un hôtel, c’était comme être chez un ami. On y était bien traitée mais on n’était pas chez soi, il y avait donc une sensation de malaise constant qui nous empêchait de profiter. Ou alors ce malaise provenait de la situation actuelle…

    Je sortais très souvent, même si c’était très contre indiqué par Eden. J’aurais dû l’écouter…

    Vous vous souvenez quand je vous ai raconté que nous étions beaucoup plus nombreux avant et qu’ils se sont tous barrés ? Eh bien ce que je n’ai pas dit, c’est qu’ils se sont alliés pour former leur propre entreprise de mercenaires, concurrente à la nôtre. Et j’ai aussi « oublié » de mentionner qu’ils s’étaient installés dans la ville où nous nous trouvions.

    Vous vous doutez bien que je ne vous ai pas dit cela pour rien…

     

    En réalité, quand Eden m’a trouvée, je n’étais pas seule. Nous étions deux paumés Etan et moi, on s’était rencontré dans le train le jour où… Je me suis échappée de chez moi.

     

    Bref, ça a tout de suite accroché mais ça n’a jamais été très loin entre nous. Etan, c’était le genre de mec latino, un peu caïd sur les bords mais finalement pas si méchant que ça, toujours à faire des blagues de cul mais pas foutu d’aller plus loin. Bref, Eden l’avait aussi embauché et nous faisions très souvent équipe. Sauf qu’il n’est pas resté.

     

    Bon, à ce stade là, vous avez sans doute deviné que je venais de le croiser en sortant de l’hôtel, hein ?

    Et comme deux anciens amis qui s’étaient brouillés, aucun ne savait quoi dire, on s’échangeait des banalités du genre « Ah, tu t’es laissé pousser les cheveux ? » « Oui, et toi tu t’es… Euh… t’as laissé pousser tes cheveux aussi ? » « Non… », pour finalement finir sur une terrasse de café autours d’une bière.

    — Putain on ressemble à des stéréotypes.

     

    Etan s’esclaffa.

    — Ouais.

    — En même temps, il n’y a pas grand-chose à dire.

     

    Son sourire diminua.

    — Ouais…

     

    Il y eut un grand silence où je me traitai intérieurement de conne, puis il réengagea la conversation.

    — Tu travailles toujours pour Eden ?

    — Ouais…

    — Ah…

     

    Je n’avais pas très envie de m’engager sur ce terrain-là, mais je n’avais pas non plus envie de partir. Etan savait beaucoup de choses de mon passé, il savait même pour cette voix… Peut-être qu’il pourrait m’aider. Ou peut-être pas. C’était loin d’être un psy.

    En fait j’avais juste envie de causer. Ça faisait longtemps. Non parce que franchement, allez parler avec Lucy ! Je vous mets au défi de tenir une conversation sérieuse !

    Et Eden ? Non, mais vous la voyez aborder un sujet un tant soit peu sentimental ?! Si oui, relisez depuis le début ou enfoncez-vous un crayon dans l’œil jusqu’au cerveau et remuez.

    — Je l’entends à nouveau, tentais-je après une courte hésitation. La voix…

     

    Etan fronça les sourcils.

    — Il se passe des trucs qui auraient pu la faire revenir ?

     

    Et merde. Eden va me tuer si je lui parle de notre boulot.

    En même temps, je savais qu’il taperait juste avant même de lui dire pour la voix. Je ne pouvais m’en prendre qu’à moi.

    — Je n’ai pas le droit d’en parler.

    — C’est en rapport avec cette affaire dont ils parlent aux infos ?

     

    Aux infos ? Ah finalement ça avait fuité ! En même temps, on ne pouvait pas étouffer longtemps des fusillades et tout ça…

    — Bordel ! Tu devrais te reconvertir en flic Et’ !

     

    C’était un compliment et, en même temps, c’était aussi une insulte. Ça dépendait de ce qu’on souhaitait comprendre.

    — Je me suis renseigné dessus, continua-t-il. C’est pas une mince affaire, c’est même carrément gore !

    — M’en parle pas, c’est moi qui ai découvert les corps…

     

    Rien que d’y repenser… Ça y est, j’avais la nausée… 

    — Comment tu t’es retrouvée mêlée à tout ça ?

    — Le boulot pardi ! Comment veux-tu que je me retrouve mêlée à quoi que ce soit avec la vie privée que j’ai ?!

    — Tu devais les éliminer ?

    — Les ramener. Vivants.

     

    Etan fronça de nouveau les sourcils. Il aurait des rides avant l’âge lui !

    — Et Eden ?

    — Elle fait en sorte à ce que nous ne nous fassions pas chopper tout en cherchant ce qu’il se passe.

     

    Il resta silencieux et je me traitai encore une fois de conne. J’aurais pas dû parler autant.

    — Etan, il y a deux tueurs bien distincts. Je pense que le premier est méthodique et travaille pour une société concurrente à nos employeurs, et le second… C’est un malade… Je marquai un temps de pause. Etan… Je n’ai aucun souvenir de la façon dont j’ai découvert les corps tués par le malade… Je ferme les yeux et pouf ! Je suis devant.

     

    C’était la première fois que j’émettais des doutes à mon sujet à voix haute. Le fait de les dire donnait encore plus d’importance à ces arguments, comme si je leur donnais de quoi se matérialiser. C’était encore plus flippant.

    Et Etan qui ne répondait pas. J’avais envie de le secouer pour qu’il me rassure ou me traite de psychopathe, tout mais pas ce silence !

    — Je pourrais te suivre discrètement.

    Bon, il ne m’innocentait pas, mais il y avait peut-être une chance pour que je le sois. Cool.

    — N’en parle à personne Et’. Eden me tuerait si elle savait que je t’ai parlé de notre affaire.

    — Tu me prends pour un débile ?

     

    Je ne répondis pas. Non, je ne le prenais pas pour un demeuré, mais, d’un côté, je me sentais toujours un peu trahie par son départ.

    Je soupirai.

    — Changeons de sujet. Lucy est toujours à la masse ?

    — Plus que jamais.

    — Et elle arrive à effectuer les missions quand même ?

    — Oui, mais Eden préfère m’envoyer plus souvent et vous ? Toujours aussi soudés ?

    — M’en parle pas, les trois quarts sont partis de leur côté ou se sont reconvertis.

     

    Il extirpa un paquet de sa poche et porta une cigarette à ses lèvres.

    — Tu ne fumes toujours pas ?

    — Je préfère garder la totalité de mes poumons.

    — Petite sainte ni touche, ricana-t-il en l’allumant avant d’inspirer une grande bouffée pour me la cracher au visage et ajouter : vu tout ce que tes vieux devaient fumer, tes poumons ont déjà dû pas mal morfler !

     

     

     

    Chapitre 13 : Tu comptes jusqu'à deux mille et nous on se cache

     Sommaire

    Lorsque je rentrai à l’hôtel, ce fut pour y découvrir une Eden au bord de la crise de nerfs, fouillant partout pour tenter de retrouver notre blond(asse) nationale. Qu’est-ce qu’elle avait encore fait celle-là ?!

    Lucy était en train de chantonner dans son coin et je tentai l’impossible : lui demander de faire appel à sa mémoire pour obtenir une information.

    — Lucy, où est la femme qui était avec nous ?

    — Ohé ce matin, y a l’lapin qui s’est pendu, là-haut, sur un arbre, son p’tit corps se balançait, lalalalala

    — Lucy ! C’est important !

    — Lapin a crié quand sa p’tite tête a cogné…

     

    Je poussai un juron et me dirigeai vers l’accueil.

    — Ils n’ont rien vu, m’arrêta Eden. J’y suis déjà allé. J’ai fait sa chambre, interrogé le personnel et les clients qui étaient dans le coin. Rien.

    — La question est plutôt : Est-ce qu’elle s’est barrée toute seule où est ce qu’on l’a enlevée ?

    — Elle avait trop peur pour partir.

    — Ouais, et elle avait siii bien sympathisé avec Lucy ! ironisai-je. Donc elle s’est fait enlever, donc Harmony est venue jusqu’ici, donc on est repérées, donc on est dans la merde.

    — Oui.

     

    Mer-ve-illeux !!!! En plus ils connaissent nos tronches et pas nous !

    Je me précipitai dans ma chambre et sautai sur le sac qui contenait mes armes. Ce mouvement me sauva in extremis du coup qui siffla à mes oreilles.

    Coup provenant d’une matraque de policier.

    Matraque au bout de laquelle se tenait un homme plutôt fin et élancé.

    Homme qui s’élança sur moi avec la souplesse et la technique d’un champion d’arts martiaux.

    J’étais une brelle en corps à corps, j’étais donc en position de faiblesse. Encore plus mer-ve-illeux !!

     

    Mais j’avais un flingue.

    Bref, appelez-moi Kaelle Luke si ça vous chante, mais je n’ai jamais été aussi rapide, et côté précision, vu que le type était à quelques centimètres de moi, je n’ai vraiment eu aucun mérite.

    Il s’effondra en basculant sur moi, me faisant tomber sur les fesses, et je me retins de souffler sur le canon de mon arme en une parodie de cow boy quand une violente douleur me déchira le ventre.

    Quelque chose de chaud dégoulina jusqu’au bord de mon jean et je retournai le mec d’Harmony d’un coup de pied sec.

    Ah le salaud ! L’enfoiré ! Le connard ! Il m’avait poignardée avant de crever ! Il m’avait… Putain j’y crois pas !

    Me relevant en pressant sur ma plaie, je cherchai du regard quelque chose qui servirait pour la panser.

    S’il y avait un mec dans ma chambre, il y en avait d’autres dans celles de Lucy et Eden.

    Bon bon, qu’est-ce que j’avais ? Des draps ? Des fringues ? Des serviettes ? Oh et puis merde, il y avait plus important ! Tant que je ne retirai pas le couteau, ça ne pissera pas vraiment le sang.

    — Eden !

     

    Virage à droite tout de suite en sortant, je passai trois portes avant de virer de nouveau à droite pour me précipiter dans la chambre de ma patronne. Vide.

     

    Bordel, non, pas toi Eden !

     

    Demi-tour toute, direction la chambre de Lucy.

     

    Mais avant, une petite pause pour crier en silence et rassembler assez de raison pour ne pas arracher ce putain de couteau en pensant que ça atténuera la douleur.

     

    Je ne suis pas une mauviette, je nesuispasunemauviette, jenesuispasunemauviette, jenesuispasunemauviettejenesuisPASUNEMAUVIETTEBORDELCAFAITMAAAAAAAAAAAAAAAALSAMERELAPU…..Eh mais c’est quoi ça ?!

     

    Un morceau de corps, enfin, ça y ressemblait, dépassait de la petite salle de bain intégrée dans la chambre. Mon flingue dans une main, l’autre pressant tant bien que mal ma blessure, je m’avançai péniblement et découvris le cadavre d’un inconnu. Sans doute un homme d’Harmony.

     

    Où était Eden alors ?!

     

    Je n’arrivais pas à réfléchir correctement, j’avais mal, j’avais envie de m’asseoir un moment, m’allonger, mais si je le faisais, je n’arriverais plus à me relever, il fallait que je tienne encore debout !

    Sortir de la chambre, trouver Eden et Lucy, ne pas aller à l’hôpital, se barrer et laisser ce foutu bordel derrière nous. On aurait jamais dû creuser, c’était pas nos oignons, ils n’ont qu’à se démerder entre eux et s’entretuer !

    — Kaelle !

     

    Je me retournai.

    — Bordel Eden, t’étais où ?

    — Dans la chambre de Lucy, je suis arrivée trop tard, ils l’ont enlevée. Bon sang comment t’as fait pour te faire avoir ?!

    — C’était un coriace.

     

    J’avais honte. Honte de m’être fait avoir comme une débutante.

    Eden soupira et je pense que je ne me suis jamais aussi sentie inefficace que maintenant. J’étais un boulet, un poids mort à présent. Comme si on avait besoin de ça…

    — Assieds-toi et montre-moi ta blessure.

     

    J’obéis, abattue et serrai les dents tandis qu’Eden, qui avait pris sa trousse de secours au passage, retirait d’un coup sec le couteau.

    PUTAIN DE BORDEL DE MERDE! Ça fait encore plus mal !

     

    Elle pressa immédiatement une compresse contre ma plaie, concentrée et me demanda de prendre le relai.

    J’étais au bord du malaise, je sentais mon sang quitter doucement contre mes membres et ma vision se rétrécir doucement.

    Que faisait Eden ?

    Je repérai une masse multicolore.

    Nickel, je n’allais pas tomber dans les vaps si je me concentrais sur ses cheveux au lieu de la douleur.

    Mon sang ne fit qu’un tour en voyant l’aiguille qu’elle désinfectait et les murs se remirent à tournoyer.

    — Euh, Eden, tu sais, un bandage et ça ira mieux, y a pas besoin de me recoudre, hein.

    — Bouge pas et fais pas ta chochotte, coupa-t-elle en approchant l’aiguille de mon ventre.

     

    Je retins un cri de douleur.

    — Kaelle… Je t’ai même pas encore touchée.

    — J’ai rien dit, me défendis je, blessée dans mon honneur de mercenaire sans foi ni peur.

     

    Je n’avais rien dit mais je n’assistai pas non plus au reste. Quelle honte ! Tomber dans les pommes pendant qu’on me recoud !

    Enfin, le point positif, c’est qu’Eden ne s’est pas démonté, et quand je revins à moi, elle avait terminé. J’avais, en quelque sorte, échappé à la torture de l’aiguille.

     

    Ce n’était quand même pas très reluisant tout ça…

     

    Je tentai de me lever mais ma patronne m’en empêcha d’une main de fer.

    — Reste couchée, repose-toi, tu ne serviras à rien pour le moment.

     

    C’était…… la…… pire…… chose qu’Eden pouvait dire.

    — Tu crois qu’ils ont tué Lucy ?

    — Le problème est là : s’ils avaient voulu la tuer, ils l’auraient fait ici.

    — Alors pourquoi l’avoir emmenée ?

     

    Eden haussa les épaules et posa une compresse imbibée de produit sur ma blessure. C’était froid et ça piquait au point de me faire contracter le ventre, ce qui, évidemment, me fit encore plus mal.

    — Le mec qui m’a fait ça avait l’air de gérer au combat.

     

    Si je ne pouvais plus servir sur le terrain, autant que je fournisse un maximum d’informations. Et puis, je devais quand même justifier mon incompétence !

    Mine de rien, je voulais prouver à Eden que je pouvais toujours servir.

    Cette dernière se mit assise à côté de moi.

    — Redresse-toi, il faut que je te mette un bandage.

     

    Me tenant à elle, je grimaçai de douleur, me forçant à penser à autre chose pour que ce soit plus supportable.

    Bon, bon, dans cette affaire, que savions-nous ?

    Qu’il y avait deux tueurs qui calquaient leurs meurtres sur nos missions. Que ça avait commencé avec Harmony. Qu’Harmony voulait tuer tout le monde. Qu’Harmony était… était…

    — Quel genre de société est Harmony ?

     

    Pas de réponse.

    — Eden, dans quel domaine bosse cette société ? À quoi servaient les recherches en génétique ?

     

    Toujours pas de réponse, mais un bandage trop serré.

    — Eden ! Réponds-moi !

     

    Quitte à ne plus servir, autant se faire hara kiri en levant le ton sur Chuck Eden.

    Elle ne répondit qu’au moment où elle rangea ses affaires.

    — Harmony est bidon.

    — QUOIIII ??????!!!!!

     

    Je me redressai d’un coup, me pliai de douleur et roulai sur le côté en jurant.

    Eden était penchée sur le cadavre dans la salle de bain et lui faisait les poches.

    — Tu te fous de ma gueule ?! Harmony, bidon ???!! Mais l’immeuble et tous les employés qui sont morts ?

    — L’immeuble était une mise en scène, j’ai fait des petites recherches dessus et je n’ai rien trouvé sur Harmony. Cette entreprise n’existe pas.

    — Mais pourquoi se donner tant de mal pour nous ? Et comment ça se fait que la blondasse connaisse Harmony ?!

    — Je n’en ai aucune idée.

    — Comment est-ce qu’ils nous ont trouvées ?

    — Aucune idée, mais je crains le pire.

     

    Je fronçai les sourcils et ne répondit pas. Bon sang, plus on avançait et moins je pigeais quoi que ce soit !

     

    Tu n’as rien à comprendre, laisse-moi agir et je règlerai touuuus tes problèmes !

     

    Ta gueule.

     

    Eden se releva, visiblement contrariée.

    — T’as trouvé quelque chose ? demandais-je.

    — Il n’a rien. Pas même une étiquette sur ses vêtements.

     

    Ouais, rien de concret quoi. Des pros.

    Je l’observais soupirer, fouiller l’homme du regard comme pour chercher un indice qui lui aurait échappé et finalement reporter son attention sur moi.

    Pitié Eden ne t’attarde pas sur moi, j’ai l’impression d’être le pire des boulets à chaque fois !

    — Il faut te planquer, tu n’es pas en état de te défendre.

    — L’hôtel n’est pas sûr.

    — Aucun endroit public n’est sûr.

     

    Bon sang, j’avais bien une idée mais j’avais encore plus honte de lui avouer !!

    — J’ai peut-être une idée d’endroit sûr… Mais tu vas gueuler…

     

     

    Chapitre 14 : WTF ?!

     Sommaire

    J’étais zonée. Totalement dans les vaps. Crevée, vidée, lessivée, ratatinée.

    Etan entra dans la chambre et soupira.

    — T’as de la chance que j’étais dans le coin et que je surveillais l’hôtel !

    — Pas tant que ça vu qu’ils ont pu entrer, enlever Lucy, et repartir !

    Il posa la tasse qu’il m’avait apportée et se pencha sur moi, l’air faussement sérieux.

    — Tu sais que c’est risqué de critiquer la personne qui te planque ?

    — Tu me fais pas peur. J’te mets la pâtée quand tu veux, où tu veux.

    — Chiche ?

     

    Je levai le poing en mobilisant une force de malade, c’est-à-dire pas grand-chose dans mon état, et fit semblant de le frapper au visage.

    De toutes façons j’étais tellement KO que même si j’avais voulu le frapper franchement, j’aurais obtenu le même résultat. Décevant.

    Etan fit quand même l’effort de faire semblant d’avoir mal, même si là, c’était plutôt pour se foutre de moi avant de rire un peu et de redevenir réellement sérieux.

    — Je t’ai fait un thé, repose toi un maximum. J’ai appelé un type qui peut te soigner discrètement, il viendra ce soir.

     

    Je me brûlai avec ledit thé, manquai de laisser échapper la tasse, et finalement la reposai sous le regard inquiet de mon ami.

    — Pourquoi tu ne quittes pas Eden ?

    — On en a déjà parlé Et’, et je pourrais te retourner la question : pourquoi t’as quitté Eden ?

     

    Il ne répondit pas, évidemment. C’était toujours comme ça à ce sujet. Et dans les deux sens.

    Je n’avais pas envie de débattre et lui non plus. Nous avions sans doute trop peur de nous brouiller pour de bon.

    Finalement, Etan se leva.

    — Je te laisse te reposer.

     

    En gros il ne savait pas quoi dire et préférait partir.

    Tant mieux, moi non plus. De toute façon le silence commençait à devenir pesant et le fait d’évoquer Eden avait suffi à me miner en songeant à ce qu’elle devait sans doute faire pour récupérer Lucy.

    Avait-elle des soucis ? Non, c’était Eden ! C’était la seule qui s’était préoccupé d’Etan et moi, la seule qui nous avait donné un toit, la seule qui nous avait donné de quoi vivre, la seule qui s’était occupé d’effacer nos traces. C’était Eden, et Etan était carrément ingrat de l’avoir quittée comme ça.

    Je fermai les yeux et tentai de me détendre.

     

    Eden.

     

    Elle n’a rien dit quand elle a su ce que j’avais fait. Elle n’a demandé aucune explication, rien. Elle m’a fait confiance et a exploité ce que je faisais le mieux : tuer.

    Non pas que je l’avais fait très souvent avant de la rencontrer. Juste deux fois. Deux personnes.

     

    Mais ça l’avait convaincue.

     

    Et dire que tous les autres l’avaient trahie alors qu’elle risquait sa vie en ce moment même pour l’une d’entre nous !

     

    Ça me… Ça me…

     

    Tiens, il faisait nuit.

     

    Quand est-ce que je m’étais endormie ? Combien de temps ?!

     

    En tout cas ça avait l’air d’aller un peu mieux, même si la douleur était toujours omniprésente.

    Etan parlait à voix basse à côté et une voix lui répondait sur le même ton.

    Etait-ce un de mes anciens collègues ? Le médecin ?

    Je me redressai, aussitôt arrêtée par la douleur, et soufflai quelques secondes pour tenter de la réprimer.

    J’entrouvris la porte le plus discrètement possible et me faufilai dans un couloir aux murs immaculés.

    Etan était justement près de l’entrée et… il… parlait… avec…

     

    Mais qu’est-ce que c’était que ce bordel ?!

     

    Qu’est-ce que cette pimbêche blonde foutait là ?!

     

    Je dû faire un bruit car Etan se retourna et me repéra immédiatement. Çalme.

    Pourquoi la blond(asse) parlait avec lui ? Elle était pas censée avoir été enlevée ?! Est-ce qu’Eden l’avait récupérée et ramenée ici ?

    Non parce que je n’étais pas stupide, si Eden l’avait récupérée le temps que je pionce, je l’aurais vue et Lucy serait là. Or ce n’était pas le cas.

     

    Est-ce que je rêvais au fait ?

     

    Non parce qu’il y avait toujours cette possibilité hein !

    — Etan, c’est quoi ce délire ? Pourquoi elle est là, elle ?

    — Kaelle, calme-toi, je te rappelle que tu es blessée. Tenta-t-il.

    — Me calmer ?! En ce moment-même, Eden est en train de risquer sa vie parce qu’on la croyait enlevée !

     

    Un flingue ! Il me fallait un flingue ! Bon sang, pourquoi je l’avais laissé dans la chambre ?!

    — Nous allons tout t’expliquer, assieds-toi.

    — Explique tout de suite.

    — Assieds-toi d’abord.

    — Explique !!

     

    Je me tenais au mur pour ne pas glisser. L’émotion rendait la douleur encore plus insupportable, je sentais le sang pulser aux abords de ma plaie et craignis un instant que les fils ne cassent.

    — Tu ne t’es jamais demandé comment Eden pouvait planquer autant de fugitifs et faire de leur boulot ce pourquoi ils étaient traqués?

    — Quoi ?

    — Tu étais recherchée par la police quand tu l’as rencontrée. Moi aussi. Nous l’étions tous. Tu ne trouves pas ça louche qu’elle réussisse aussi rapidement à brouiller les pistes pour autant de personnes ?

    — Elle est juste… douée ?

     

    Où est-ce qu’il voulait en venir au juste ?

    — Tu ne trouves pas ça bizarre qu’elle ne te demande aucune précision sur les meurtres que tu as commis ? Tu ne trouves pas qu’effacer les preuves d’un truc dont elle ne connaît aucun détail relève du miracle ?!

    — Qu’est-ce que tu veux dire ?

     

    La réponse était évidente. Tellement évidente et tellement terrifiante que je refusais de l’avouer. Je ne voulais pas que mon monde, mon seul et unique point d’attache, Eden, s’effondre.

    — Eden…

     

    Non ne le dis pas ! Je ne veux rien entendre !!

     

    Mais Etan continua.

    — Te mens depuis le début.

     

    Mes jambes se dérobèrent sous mon poids et on dû me soutenir pour m’éviter de tomber.

    — Pourquoi ?

    — On sait pas. C’est pour ça que nous avons monté tout ce scénario.

    — Monté ce scénario ?!

    — Depuis que nous avons quitté Eden, nous avons élaboré un plan tout ce temps-là pour la démasquer. Megan est une actrice comme tous ceux que nous avons engagés, rien d’autre !

    Megan… C’était qui encore ?

     

    Bon, à en juger par son geste désignant la blond(asse), j’en déduisis que c’était elle.

    Mais bon sang ils ne pouvaient pas avoir monté toute cette histoire de malade !!!

    — Et… Et les morts ?

    — C’était une liste de contrats que nous avions à exécuter. Nous en avons profité pour donner du réalisme en l’insérant dedans. Nous savions qu’Eden serait très difficile à berner et il fallait quelque chose pour l’appâter.

    — Espèce. De. MALADE !

     

    Je me débattis et le frappai aussi fort que possible, profitant de l’effet de surprise pour me dégager et partir chercher mon flingue dans la chambre.

    J’avais mal, très mal au ventre, mais l’instinct de survie était plus fort.

    Etan aussi était plus fort. Et plus rapide.

    Il fut sur moi en quelques secondes, me fit tomber et me plaqua au sol, appuyant assez sur ma blessure pour me faire hurler de douleur.

    — Kaelle ! Intervint la blondiprostipute (oui, c’était désormais son nouveau surnom). Je sais à quoi tu penses, mais nous n’avons rien à voir avec ces meurtres cannibales !

    — Lâchez moi bande de salauds ! Lâchez-moi putain ! gueulais-je.

     

    Une gifle puissante me fit voir trente-six chandelles. C’était la première fois que nous nous tapions dessus avec Etan et je comprenais pourquoi. J’avais un bon instinct de survie.

    — Kaelle ressaisis-toi bordel ! Tu me vois vraiment bouffer des gens ?!

     

    Je pleurais, mes nerfs lâchaient, je ne savais plus à qui me fier, ni à quoi, je ne savais plus rien du tout.

     

    Laisse-moi.

     

    — Ecoute-moi ! Tu m’as toujours fait confiance, non ?

     

    Je pourrais tout régler et après on repartirait de zéro.

     

    Nous ne sommes pas tes ennemis Kaelle ! C’est Eden qui nous a trompés depuis le début ! J’ai toujours voulu te le dire mais je ne pouvais pas à cause de ce plan !

     

    Qui croire ? Moi ! Seulement moi ! Il n’y a que moi qui ai réellement résolu tes problèmes.

     

    Kaelle !

     

    Kaelle !

     

    Kaelle ?

     

    Kaelle !

     

    — Vos gueules tous les deux !! hurlais-je.

     

    Je vis Etan et l’autre pâlir.

    — Tous. Les. Deux ? Articula-t-il. Mais Megan n’a pas….. parlé…… Oh merde !

     

    Il se pencha immédiatement sur moi, collant son front contre le mien.

    — Ne laisse pas la voix prendre le dessus Kaelle, tu pourrais nous aider, avoir une autre vie, une vraie vie. Fais-moi confiance Kaelle, ne l’écoute pas, elle ne pourra jamais régler tous tes soucis. Rappelle-toi comment elle a réglé tes problèmes la dernière fois.

     

    Oh oui, rappelle-toi comment nous les avons réglés !

     

    — Rappelle-toi l’horreur de la scène ! Toi-même tu n’as pas pu supporter de voir tout ça !

     

    Mais grâce à moi ces salauds ne te frapperont plus jamais !

     

    — Etan, qu’est-ce qu’il se passe ? intervint la blondiprostipute, paniquée.

    — On est en train de la perdre ! Kaelle ! Rappelle-toi comment tu as dû fuir !

     

    Nous étions à la belle étoile et plus dans ce petit placard étroit ! Nous étions libres ! Plus de sangles, plus de liens, plus d’inconnus qui profitaient de notre faiblesse, plus de coups !

     

    — Kaelle !!! céder à cette putain de voix c’est te mettre au niveau de cet enfoiré de tueur cannibale !!

     

    La voix se tut brusquement et je me retrouvai à pleurer dans les bras d’Etan. Je ne voulais pas devenir comme ce psychopathe bouffeur de gens ! Non ! Non ! NON !!!

    — Pourquoi tu ne m’as pas tout dit au moment de partir ? Sanglotais-je.

    — Tu idolâtrais Eden. Rien de ce que j’aurais pu te dire ne t’aurait fait changer d’avis.

    — Je… Je…

    — Arrête de te voiler la face. Tu nous aurais dénoncés à coup sûr et même maintenant alors que tu as l’évidence sous le nez, tu n’y crois toujours pas. Eden n’est pas celle que tu crois.

    — Elle travaille pour qui ? Pour le gouvernement ?

    — Je sais pas, il se pourrait qu’elle ait des liens avec, oui. Peut-être des contrats avec eux en échange de services.

    — Et Lucy ?

     

    Du coin de l’œil, j’aperçus la blondiprostipute décrocher son téléphone pour répondre à un appel.

    — Lucy est dans le même cas que toi. Totalement paumée.

    — Mais pourquoi l’avoir enlevée ?

    — À l’heure qu’il est, les autres sont en train de jouer la comédie à Eden pour lui faire cracher le morceau.

     

    La voix glaciale de l’autre retentit. Elle avait raccroché son téléphone et son visage était plus grave que jamais.

    — Mike est allé à l’entrepôt. Il n’y a plus personne.

     

     

     

    Chapitre 15 : No more Mr Nice guy

     Sommaire

    — Kaelle, tu restes couchée en attendant l’arrivée du docteur, on s’occupe de tout.

    — Ben voyons, tu crois vraiment que je vais vous laisser aller là-bas et descendre Lucy et Eden ?

    — Il n’y a plus personne, ils ont disparu, alors je me vois mal descendre qui que ce soit, rétorqua Etan en m’obligeant à m’allonger dans le lit.

     

    Je me redressai et il me plaqua en aboyant un « couché ! » si autoritaire que je n’osais plus réagir.

    Wow, il sait se faire obéir lui… Je ne le connaissais pas comme ça ! Il avait déjà pensé à prendre un chien ? Non parce que la bête lui obéirait au doigt et à l’œil ! Je parie qu’il pourrait même lui faire faire la cuisine et le ménage comme ça !

    Enfin, vu mon état, il valait peut être mieux que je reste ici. J’étais hors d’usage physiquement et totalement détruite psychologiquement.

     

    À qui faire confiance ?

     

    Eden avait sans doute ses raisons mais tant de choses étaient louches ! Est-ce qu’Eden c’était son vrai nom ?

    Soupirant, je fermai les yeux et repassai tous les évènements de ces dernières semaines. Quel beau foutoir quand même !

    Et dire que je n’avais même pas tenu jusqu’à la fin. Quelle sacrée mauviette je faisais...

    Et cette foutue voix…

    Oh je savais que je devrais aller voir un toubib, un psy, mais vous me voyez y aller ?

    « Bonjour ! J’ai une seconde personnalité qui a massacré mes parents, pourriez-vous lui dire de se calmer s’il vous plait ? »

    Non, c’est pas mon genre de dire « s’il vous plait ».

     

    Etan était parti avec l’autre blond(asse), ah oui, hum, désolée, l’autre blondiprostipute, voilà, c’était mieux. Bref, ils étaient partis, avaient fermé le verrou en disant que le docteur avait un double des clefs (étrange pour un docteur, mais s’il soignait à domicile sans faire d’histoires ni dénoncer qui que ce soit, je me doutais de quel genre de médecin il s’agissait), et je n’avais plus entendu un bruit. Jusqu’à maintenant.

    Cette fois-ci, je pris mon flingue.

     

    Ce que je venais d’entendre ne ressemblait pas du tout à une clef qui tournait dans une serrure.

     

    Il y avait un intrus dans l’appartement.

     

    J’avançai difficilement, remplaçant la douleur par l’adrénaline et la volonté de me faire le plus silencieuse possible.

    Rien dans le couloir. Même pas de quoi se planquer pour prendre l’intrus par surprise.

    Je me risquai dans le salon, tout aussi neutre et dénué de superflus que le couloir, sans rien trouver.

     

    Si ça se trouve je délirais totalement.

     

    — Tu as toujours été très douillette. La moindre égratignure et tu pensais mourir…

     

    Ah non, j’étais vraiment pas seule.

     

    Je me retournai sans baisser mon arme, le visage impénétrable.

    — Eden… Où est Lucy ?

    — Aucune idée, mais j’ai trouvé des informations bien plus intéressantes.

     

    Elle eut un sourire amer et continua.

    — Enfin, vu ta méfiance à mon égard, tu as appris la même chose que moi.

     

    Cool… Maintenant j’étais officiellement dans l’autre camp… Si Eden passait à l’attaque j’étais morte !

    — Qui es-tu réellement ?

    — Et toi Kaelle, qui es-tu réellement ?

    — Ne joue pas à ça, réponds-moi.

     

    Bon sang j’avais jamais été aussi suicidaire !

    — Quelle importance ? Tu te souciais de l’identité de tes contrats ? Parce qu’après tout, qu’est-ce qu’une identité ? Seule compte la finalité.

    — Arrête de me gaver de conneries philosophiques pour ne pas répondre. Je t’ai posé une simple question, alors réponds bordel !

     

    Oui, je perdais patience, tout simplement parce que plus Eden parlait, plus elle confirmait les dires d’Etan et plus elle détruisait toute la confiance que j’avais eue en elle.

    Eden profita d’un court moment d’hésitation pour me désarmer d’un coup de pieds avant de me mettre à genoux en m’envoyant son poing dans le ventre.

    Je sentis ma plaie se rouvrir et la pressai pour retenir le sang qui coulait déjà.

    Mon ex patronne frappa de nouveau en visant ma tête et j’eu le réflexe de me laisser tomber totalement au sol afin de l’éviter.

    Ne me demandez pas d’où je sortais ce réflexe qui gère à mort, moi-même je n’en revenais pas !

    Je dépliai ma jambe droite et la projetai devant moi pour la déséquilibrer.

     

    Trop lente.

     

    Eden sauta agilement et en profita pour me donner un nouveau coup de pied en utilisant tout son poids lors de l’atterrissage.

    Crachant du sang, je remarquai qu’elle avait une arme à la ceinture. Elle aurait très bien pu s’en servir dès le début.

    Alors elle me tabassait pour le plaisir ?! Mais quelle connasse ! Après tout ce qu’on avait vécu ensemble !

    Elle allait me donner un nouveau coup de pieds quand une pensée me traversa.

    — Et Lucy ?

     

    Bon, au moins cette question l’arrêta dans son geste.

    — Qu’est-ce qu’il va arriver à Lucy ?

    — Je la tirerais de là. Elle soupira. Je ne suis pas la méchante Kaelle.

    — Oh vu comment tu te défoules sur moi, j’en doute !

    — Tu me prends pour un monstre alors que j’ai eu la bonté d’effacer vos casiers judiciaires. Même quand tout le monde est parti, je leur ai laissé ce petit cadeau.

     

    Non mais c’est pas vrai ! Elle se pose en victime là !

     

    — Comment les as-tu effacés ?

     

    Je comprenais maintenant le but du plan d’Etan et des autres : la forcer à effacer des choses de plus en plus grosses pour la coincer.

    — Comment tu as pu étouffer les derniers meurtres dans lesquels nous étions impliqués ?

     

    Hé mais attendez… Etan ! On était chez Etan !

     

    — Il vaudrait mieux que tu ne fouilles pas trop là dedans, cracha Eden en écrasant sa pompe sur mon visage.

     

    Elle soupira de nouveau. On aurait presque dit que j’avais deux Eden en face. Une agressive, qui se défoulait sur moi, l’autre surprotectrice, comme si son secret était trop lourd et dangereux pour nous.

     

    J’encaissai, stimulée par ma précédente révélation.

     

    Non mais parce qu’on était chez Etan, qui était mon meilleur pote, qui bossait avec moi pour Eden et qui continuait à bosser dans le domaine.

     

    Logiquement…

     

    Je cherchai du regard.

     

    Looogiiiquemeeeennnnnt……

     

    — Laisse tomber Kaelle. Je serais obligée de te tuer si tu continues. Je serais obligée de vous tuer tous. Pour votre bien. C’est préférable. S’Il vous tombe dessus…

     

    Nouveau coup. Eden m’attrapa par la gorge et me releva. Je tenais à peine debout, mais visiblement c’était pas le but recherché puisqu’elle me décocha une droite monumentale qui me fit retomber aussi sec.

    Mon bras en profita pour se glisser sous le canapé.

     

    Trouvé !

     

    Son pied aussi s’enfonça violemment dans mon ventre, je me retournai et le coup partit.

    Eden s’effondra, éparpillant sa cervelle derrière elle.

     

    Logiquement, un bon tueur comme Etan planquait toujours des flingues partout chez lui.

     

     

     

     

    Sommaire 

    Chapitre 16 : Aaaaaaaaah que le monde est petit !

     

    C’est le moment-là que choisit le docteur pour faire son entrée.

     

    Mesdames et messieurs, applaudissez la star du show : le toubib qui arrive presque au milieu de la nuit pile au moment où je descends ma patronne ! Youhouuuu !!!

     

    Je braquai immédiatement l’arme d’Etan sur lui pour éviter qu’il se barre.

    — Etan a appelé pour moi à la base. Je crois que vous aurez plus de boulot que prévu…

     

    Bizarrement, il ne semblait ni effrayé ni même surpris. Juste très blasé.

    Il ferma la porte calmement et se rapprocha avec sa valise, jetant à peine un regard au cadavre d’Eden.

    — Vous semblez habitué… commentai-je en constatant que mon visage me faisait carrément mal.

    — Je le suis, répondit-il doucement en s’agenouillant à ma hauteur.

    — Cool…

     

    Il inspecta mon visage et le tamponna avec du produit qui pique sa race. J’ai été courageuse.

     

    Et puis il a regardé ma blessure au ventre.

     

    Et puis il a sorti du fil et une aiguille.

     

    J’ai été beaucoup moins courageuse.

     

    Je me suis réveillée allongée sur le canapé.

     

    Au passage, il s’agissait d’un canapé en cuir blanc, donc je vous laisse imaginer à quel point le rouge-noirâtre du sang coagulé se mariait merveilleusement bien avec.

    Le docteur était assis dans le fauteuil à droite, sans doute livré avec le canapé, même couleur, même matière, une tasse à la main.

     

    Lorsqu’il vit que je le fixais, il commenta ce que j’avais raté :

    — La plaie au ventre n’est pas très profonde, le risque d’hémorragie interne est faible.

    — Malgré le fait qu’on ait tapé dessus ?

    — Le mieux serait de faire une radiographie.

     

    Blanc.

     

    Visiblement il s’attendait à ce qu’un roulement de tambour retentisse comme après une grosse blague où j’éclaterais de rire.

    — Quel genre de médecin êtes-vous au juste ?

    — Le genre qui exerce dans l’ombre.

    — Ah…. Le genre pas légal quoi…

     

    Rassurant !

     

    — Et vous faites quoi quand c’est grave ?

    — J’opère.

    — Comme ça, sur place ?!

    — Vous êtes une comique vous !

     

    Mais oui bien sûr, ça se voit pas à mon nez rouge ?

     

    Bon, revenons au sujet principal, combien de temps j’allais rester bloquée ?

    — Et je peux bouger normalement là ?

    — Presque, évitez de vous surmener, privilégiez le repos. Beaucoup de repos. Mais ça fait un moment que j’ai renoncé aux patients qui se reposent bien sagement quand on leur demande.

     

    Il se leva et soupira en ouvrant sa valise.

    — Par précaution prenez des antibiotiques. On ne sait jamais. Vous restez chez Etan ?

    — J’en sais rien.

     

    Toujours cet air blasé. Il posa deux boites blanches à côté de moi et me conseilla de prendre un cachet trois fois, pour les antibiotiques, et d’éviter de prendre plus d’un anti douleur par intervalle de six heures.

    — Je repasserais dans deux jours si vous êtes toujours là.

    — Ok, merci.

     

    Finalement, il me salua et sortit sans fermer à clef derrière lui, me laissant seule avec le cadavre d’Eden.

     

    Bon, et maintenant, qu’est-ce que je faisais ?

     

    Fixant la bouillie qu’était le cerveau de mon ex patronne au milieu de cet arc en ciel qu’étaient ses cheveux, je fronçai les sourcils. Quelque chose clochait dans la façon dont sa tête avait explosé. Quelque chose … Il me semblait avoir tiré en face d’elle… alors pourquoi… Mon regard remonta vers la fenêtre. Je ne l’avais pas entendue éclater quand j’avais tiré, mais maintenant je ne voyais plus que ça. C’était pas moi qui avait descendu Eden. Ma balle avait atterri derrière, dans le mur. Un tir assez pitoyable.

     

    Et si Eden n’était en rien responsable de la disparition de Lucy et des autres, qui l’était alors ?

     

    Le tueur cannibale ?

     

    Un long frisson me parcourut l’échine et je m’éloignai le plus vite possible de la fenêtre. On sait jamais.

     

    Il fallait que je prévienne Etan. Est-ce qu’il avait un téléphone quelque part au moins ?

    Je me levai péniblement, emportant les boites de médicaments avec moi.

    D’abord un passage par la cuisine pour prendre de quoi me remettre sur pieds.

    Je m’emparai d d’un paquet de gâteaux trainant dans un placard, avalai un antibiotique et un anti douleur avec un grand verre d’eau et commençai à fouiller l’appartement à la recherche d’un téléphone.

    Il ne m’avait quand même pas laissée toute seule sans aucun moyen d’appeler à l’aide !

    Finalement je dénichai un ordinateur portable dans sa chambre, l’allumai et…. Mot de passe.

    AH AH AH !

    Combien de chances il y avait-il pour qu’il n’y ait pas de mot de passe ? Aucune, je me demandais même pourquoi j’avais pris la peine de l’allumer !

     

    Enfin, comme j’étais là, autant tenter quelque chose.

     

    MortàEden.

    Incorrect.

    Eden.

    Incorrect.

    Topsecret.

    Incorrect.

    Vivaespagna.

    Incorrect.

    Petitlapindamour.

    Incorrect.

     

    Bon, soit je passais ma prochaine heure à chercher tous les mots de passe inimaginables, soit je cherchais autre chose.

     

    Pas de temps = seconde solution.

     

    Etan avait fait en sorte de ne rien laisser de compromettant, aucun document, aucun objet anormal. Strictement rien mis à part quelques armes cachées un peu partout pour se défendre.

     

    Où était donc son arsenal ? Sa planque principale ?

     

    Et si ses documents étaient codés ?

     

    Raaaah et même pas un numéro de téléphone où le joindre !

     

    En parlant de téléphone… Celui d’Eden avait bien celui d’ « Harmony » en mémoire, non ? Peut-être que j’arriverais à remonter jusqu’à Etan si j’arrivais à joindre celui ou celle chargé de répondre et de nous baratiner.

    Je fouillai rapidement les poches de mon ancienne patronne et en extirpai le portable.

     

    Dernier numéro composé. Ça sonnait de l’autre côté.

     

    Qui que tu sois à l’autre bout du fil, répond !

     

    Ça continuait de sonner.

     

    Réponds !!

     

    Fin de l’appel.

     

    Merde !

     

    Bon sang où pouvaient-ils bien être ?

     

    Etan avait parlé d’un entrepôt.

     

    Un entrepôt…

     

    Oh pitié, faites qu’Eden ait utilisé le GPS de son téléphone pour y aller.

     

    Yahhaaa !! Victoire !

     

    Je me dirigeai vers la porte d’entrée et stoppai net, la main sur la poignée.

    J’avais du sang partout, il valait mieux me changer avant de sortir et d’ameuter tout le monde. Les seules fringues propres disponibles étaient ceux d’Etan qui n’avait carrément pas mon gabarit. Tant pis, je retrousserais le pantalon, serrerais la ceinture et flotterais dans son haut. L’important c’était d’éviter d’avoir l’air suspect. Enfin, dans la limite du possible… Et puis les fringues larges étaient pratiques pour planquer des armes.

     

    Une fois dehors, j’évaluai la distance à pieds entre ledit entrepôt et ma position. Je n’avais pas un sou en poche et pas trop envie de me faire choper en piquant une voiture. De toute façon je ne savais pas conduire.

    Il était tard dans la nuit et je ne croisai pratiquement personne mais je tentai quand même une technique un peu risquée mais efficace : l’auto stop.

     

    Et avec un grand sourire bien sûr ! Avec ma gueule ravagée et ma posture de vieille au bord de la mort, je devais avoir l’air trop sexy !

     

    Une voiture s’arrêta au bout d’une vingtaine de minutes, ce qui était plutôt rapide en prenant en compte le peu qui circulait. Quelle chance !

    Je me penchai pour voir le conducteur.

     

    Ah… Non finalement j’avais pas de chance.

     

    — Monte, Etan nous a prévenus que tu étais au courant de tout.

    — Sur tout le monde qui circule à cette heure-ci il a fallu que je tombe sur toi !

     

    Daniel, grand, mince, blond, très blond, le genre de type qui a la classe même en portant un sac poubelle et, accessoirement, ancien collègue, démarra sans relever mon commentaire.

    — Qu’est-ce que tu fais dehors ? Tu es blessée, non ?

     

    Je répondis sur un ton faussement enjoué :

    — Le docteur est passé, je suis guérie.

    — Tu comptais aller où ?

    — Oh, pas très loin, dans un petit entrepôt à une trentaine de minutes à pied. Comme Etan m’a laissée sans rien pour le joindre je n’ai pas pu lui dire qu’Eden m’avait rendu visite et que je l’ai descendue.

     

    Il valait mieux garder pour moi ma petite découverte.

    — QUOI ?!

     

    Daniel pila brusquement et se tourna vers moi.

    — Tu as fait quoi ?!

     

    Face à une réaction hystérique comme ça, une seule solution : garder son calme même si c’était pour dire un truc totalement énorme.

    — Je l’ai descendue. Elle allait me tuer, c’était elle ou moi.

     

    Il enfouit ses mains dans son visage et marmonna quelques insultes étouffées.

    Je continuai :

    — Elle a rien trouvé non plus à l’entrepôt. Tout le monde avait déjà disparu. Qu’est-ce qu’il s’est passé alors ?

     

    Une voiture klaxonna derrière nous et Daniel soupira en démarrant. Il sortit son téléphone portable et composa un numéro.

    Je l’écoutai expliquer sa situation puis acquiescer calmement avant de raccrocher. Cinq minutes s’étaient écoulées.

    — Alors ?

    — Ils ont retrouvé les trois cadavres de nos hommes plus loin. Un d’entre eux était dévoré.

     

    Ils avaient prévu de cuisiner Eden à trois seulement ?! C’était pas très futé !

    — Et Lucy ?

    — Disparue.

     

    Cette nouvelle me mina.

    Le tueur l’avait-il enlevée ? Est-ce qu’elle s’était échappée entre temps ?

    — On fait quoi maintenant ?

     

    Daniel ne répondit pas, il réfléchissait.

    Je n’avais jamais vraiment accroché avec lui, il avait toujours cet air supérieur en toute circonstance, comme si nous n’étions que des larves comparés à lui.

     

    Quel meurtre avait t’il bien pu commettre qu’Eden aurait effacé ?

    Où est ce qu’il m’emmenait au fait ?

    Avec la mort d’Eden, leur mission avait été avortée.

     

    Par ma faute.

     

    Enfin, s’ils m’en avaient touché mot dès le début ça ne serait jamais arrivé !

    — On va où ?

     

    Toujours pas de réponse mais deux passagers qui grimpèrent quelques minutes plus tard. Etan et la blondiprostipute.

    La mine sombre, Etan me demanda comment Eden était morte. Je lui racontai tout, insistant sur le fait que j’avais quand même essayé de lui tirer les vers du nez. Ma gueule amochée joua en ma faveur.

    Ce fut alors à mon tour de leur poser des questions. Enfin une :

    — Et Lucy ?

     

    Etan me répondit après quelques secondes de réflexion :

    — On pense qu’elle a réussi à s’enfuir dans la panique générale.

    — Le tueur l’a peut être rattrapée ! Il faut arrêter ce malade !

     

    Cette fois ci Daniel intervint :

    — Il faut d’abord qu’on en réfère au patron.

    — Tiens c’est vrai ça, qui est devenu votre chef ?

    Stan ? Çarrie ? Eva ? Nathan ?

     

    Qui avait bien pu remplacer Eden auprès d’eux ?

     

    Oh et puis, là n’était pas le problème ! Le temps qu’on discute Lucy était peut-être en train de se faire dévorer ! Il fallait qu’on se grouille !

     

    Etan avait à peine ouvert la bouche que je le coupai :

    — Si on veut sauver Lucy il faudra agir vite ! Nous perdons trop de temps là.

    — Mais oui, bien sûr, courrons au hasard après un tueur cannibale qui a réussi à dégommer trois tueurs expérimentés !

     

    Mais qu’est-ce qu’elle foutait encore là cette foutue bonne femme ?! C’était une actrice ! Et une mauvaise en plus !

    — Vous ne pouvez pas l’abandonner au bord de la route, elle ? éclatai-je. Vous n’avez plus besoin d’actrice !

    — Et puis quoi encore ?! Je n’ai pas encore été payée !

    — Pour ta pitoyable interprétation ? Laisse-moi rire !

     

    Daniel ouvrit la fenêtre du côté de la blondiprostipute. C’était vrai qu’il faisait chaud avec toute cette tension !

    — Non mais je rêve ! Et vous la laissez me parler comme ça ?! Je vous rappelle qu’elle faisait partie de l’autre camp encore hier et qu’elle a fichu en l’air tout votre plan !

    — Espèce de… !

    — Faites quelque chose bon sang ! Déjà qu’elle est totalement cinglée avec sa double personnalité !

     

    Le coup de feu partit avant même que j’aie pu être blessée par cette remarque et Etan plaqua le canon de l’arme encore fumant à quelques centimètres de mon front. C’était suffisamment près pour que je le sente me brûler.

    À côté de lui, le cadavre de l’actrice ratée gisait. La balle avait traversé sa tête et était sortie par la fenêtre ouverte. C’était donc pour ça que Daniel l’avait baissée… D’ailleurs il la remontait calmement à présent.

    — Tiens-toi tranquille maintenant. Nous n’avons aucun moyen de les localiser tous les deux à moins d’en parler au chef et de rassembler tout le monde.

     

    Comme disait le proverbe « celui qui a le flingue à toujours raison » ; je me retournai donc face à la route et ne bronchai plus tandis que Daniel conduisait sans prêter la moindre attention à ce qui venait de se passer. Enfin en apparence.

    Etan dut me bander les yeux vers la fin du trajet et j’ai bien essayé de retenir les endroits où il tournait à tel ou tel moment, mais je me suis emmêlé les pinceaux au bout de trente secondes.

    J’étais anxieuse à l’idée de rencontrer le nouveau chef. Je n’avais aucune idée de qui c’était, ni de ce qu’il allait décider à mon sujet. J’avais envie de me tirer de là, d’ouvrir la portière et de me jeter dehors.

     

    Mais je serais encore plus amochée…

     

    Chiche ?

     

    Pas chiche ?

     

    À quelle vitesse roulait-il ?

     

    Allais-je survivre si je fuyais de cette manière ?

     

    Daniel ferait il demi-tour pour me récupérer ? Ou me descendre ?

     

    Qu’allais-je faire une fois libre ?

     

    Non, sans blagues, je n’avais ni argent, ni logement, et je n’oserais pas montrer mes papiers d’identité de peur de finir en taule. Depuis le temps que je dois y aller, ils finiront bien par me tomber dessus, surtout que maintenant qu’Eden était morte, je n’avais plus personne pour me blanchir !

     

    Quelle conne !

     

    La voiture s’arrêta et le son des ceintures qu’on débouclait m’indiqua que nous étions arrivés. Quelle talentueuse enquêtrice je faisais !

    Etan me guida pour sortir de la voiture et je démontrai à quel point j’étais une quiche quand il s’agissait de me déplacer sur terrain irrégulier avec les yeux bandés.

    Une fois rentrée dans ce qui semblait être une maison, à en juger par la chaleur et le son traditionnel de nos pas sur de la moquette, on me rendit la vue et je pu admirer la maaaaaaaaaaaagniiiifique déco rose bonbon agrémentée de tableaux de chatons.

     

    Et ce n’était que le couloir.

     

    C’est ainsi que, lorsque j’arrivai dans le salon, face à ce qui était apparemment le chef, je me demandai comment un mec entouré d’une telle aura de darkitude avait pu atterrir ici, affalé dans un canapé à fourrure rose.

    Et puis d’abord…

     

    Qui était ce type ?!

     

     Sommaire

    Chapitre 17 : Le ténébreux

     

    Je connaissais tous ceux qui avaient quitté Eden, pas totalement, certes, mais au moins de visage à défaut de retenir tous les noms et une chose était sûre : je n’avais jamais vu ce mec auparavant.

     

    Qui était ce mystérieux chef ?

     

    Je jetai un coup d’œil à Etan pour lui demander des petites explications, ou au moins des présentations, mais ils se fixèrent dans le blanc des yeux pendant quinze bonnes secondes encore avant que Daniel ne prenne la parole :

    — Nous avons de très mauvaises nouvelles.

    — Et c’est la raison pour laquelle vous m’amenez cette fille ?

     

    Hé ho ! Pour qui il me prenait ?!

    — Eden est morte.

     

    L’autre pâlit à vue d’œil et se redressa.

    — Quoi ?!

     

    Etan prit la relève :

    — Et nous avons perdu notre otage et les hommes qui la gardaient. Enfin… On a retrouvé nos hommes dévorés. L’otage est introuvable.

     

    Je cru que l’autre allait tomber dans les vaps sous le choc de la nouvelle et j’en ressentis une sorte de satisfaction.

     

    Petite nature.

     

    — Qu’est-ce qu’il s’est passé ?

    — Eden nous a trouvés, elle a voulu me surprendre chez moi mais il n’y avait que Kaelle. Elle s’est défendue.

     

    Le chef me foudroya du regard, je sentis un long frisson me parcourir l’échine et eut l’envie de me tirer en courant avant qu’il ne m’abatte sur place. Il rivalisait presque avec Eden côté regard de la mort qui tue !

    — Il faut se débarrasser de ce tueur cannibale qui s’acharne sur nous depuis le début !

     

    Une lueur me parcourut l’esprit et je demandai :

    — J’ai une question : si vous ne vouliez pas nous tuer, pourquoi nous avoir tiré dessus au bout d’un moment ?

    — Nous n’avons envoyé personne vous tirer dessus, répondit le chef.

     

    Sa voix était grave, à l’instar de son physique, elle renforçait encore plus son appartenance au type « ténébreux ».

     

    Il devait en avoir des groupies !

     

    Il ne manquait plus que le ciel gris et le vent dans ses cheveux noirs, mi longs s’agitant pendant qu’il posait en lançant son regard noir plein de mystère à l’horizon.

     

    Le type qui me faisait gerber quoi.

     

    Désolée, les hommes et moi, c’est pas une grande histoire d’amour.

    Je pourrais même généraliser : les gens et moi, c’est pas une grande histoire d’amour.

     

    J’ai assez donné de ma personne là-dedans.

     

    — Mais c’était qui alors ces types en costard ?!

     

    Aucune réponse.

    Ah elle était belle la fine équipe ! Leur plan était tombé à l’eau depuis le début et ils avaient continué de s’acharner dessus jusqu’au bout ! Bravo !

    — Vous avez quelques indices au moins ?

    — Ce ne sont pas tes affaires, trancha le ténébreux chef dont je ne connaissais toujours pas l’identité.

     

    Il sortit son téléphone de sa poche : un téléphone de ténébreux, noir et mystérieux.

    — Je vais mobiliser l’équipe de recherche. Rentrez chez vous.

     

    Lueur d’espoir.

     

    Moi aussi ?

     

    — Et pour Kaelle ?

     

    Tu sais Et’, tu aurais très bien pu m’embarquer avec toi sans lui rappeler ma présence !

     

    — Laissez la-ici. Je verrais ce que je vais en faire.

     

    Et merde ! Tu ne pouvais pas la fermer Etan ?!

     

    Ce dernier me jeta un regard désolé et se dirigea vers la sortie.

     

    C’est ça ! Abandonne-moi ! Je sais même pas d’où sort ce fichu chef, ni même ce qu’il compte me faire !

    Tu n’auras pas la conscience tranquille ! Mon fantôme viendra te hanter s’pèce de lâche !

     

    Une fois que Daniel et Etan furent partis, je restai là, debout au milieu du salon face au ténébreux.

    — Assise.

     

    Hého ! Il me prenait pour quoi ?

     

    On ne me donnait pas d’ordre comme à un chien !

    Et tiens, pour bien lui faire comprendre je restai debout !

     

    Trois secondes.

     

    On va dire que c’était une force obscure qui m’a fait m’asseoir.

    Ma fierté a déjà assez été réduite en miettes pour en encaisser plus.

    Le canapé était confortable. Un peu trop rose à mon gout. Et un peu trop… poilu aussi…

    À côté de moi, le chef ténébreux s’affairait à donner des ordres par téléphone afin de retrouver Lucy.

    S’ils étaient aussi organisés qu’ils en avaient l’air, je ne donnais pas cher de la peau de Lucy… Non parce qu’ils étaient apparemment carrément nombreux et n’avaient toujours pas mis la main ni sur le tueur, ni sur les types en costard !

    Le chef raccrocha et je tentai un passage aux toilettes. Peut-être que j’arriverais à me tirer discrètement !

    Il refusa net et soupira en me regardant.

     

    « Qu’est-ce qu’on va bien pouvoir faire d’elle ? »

    J’étais sûre qu’il se posait cette question !

     

    Et puis c’est vrai ! Que vais-je devenir ?

    — Ton flingue. Pose-le sur la table.

     

    Je soupirai et posai mon arme.

    — Ton couteau aussi.

     

    Le couteau aussi.

    — Ton autre couteau. Et le petit flingue à ta cheville.

     

    OK, c’était Superman en fait… Il avait une vision à rayons X.

     

    Et maintenant ?

     

    Il déchargea les flingues et prit les couteaux, histoire d’être sûr que je ne pourrais pas m’en servir contre lui. Pas con le bonhomme. Comment j’allais me sortir de là ?

    — Quand vous aurez trouvé Lucy, qu’est-ce que vous allez en faire ? Elle ne se rangera jamais de votre côté.

     

    Il se leva, jeta un rapide coup d’œil par la fenêtre ornée de rideaux en dentelle blanche et s’alluma une clope.

    Comment un mec pareil pouvait se trouver dans une maison pareille sans provoquer d’explosion nucléaire tant le contraste était puissant ?!

    Franchement, si je devais mourir là maintenant, ce que je n’espère pas, hein, je mourrais en ayant au moins vu ça.

    Le ténébreux me fixa encore, fis quelques pas, comme s’il hésitait et finalement m’invita à la suivre à l’étage sous prétexte qu’il avait quelque chose à me montrer.

     

    Me montrer quoi au juste ?

     

    Je n’aimais pas me retrouver dans une chambre avec un homme. Sauf peut-être Etan, mais je savais très bien qu’il ne me toucherait jamais. Il savait ce que mes parents m’avaient obligé à faire…

     

    Le chef, j’en étais pas si sûre…

     

    Une fois en haut des escaliers, il se dirigea vers une chambre et l’ouvrit en disant d’une voix enjouée :

    — Je t’ai apporté une surprise ma chérie !

     

    Ma chérie ?

     

    Je passai devant lui pour entrer et reçut un énorme coup sur la tête.

     

    Ouch !

     

    Je m’effondrai mais j’avais eu le temps de voir ce que la chambre renfermait.

     

    Lucy.

     

     

     

     

     

     

     

    Sommaire 

    Chapitre 18 : Pas glop !

     

    Je me réveillai attachée sur un lit. Lucy chantonnait à côté de moi sur une chaise.

    — Lucy, qu’est-ce qu’il s’est passé ? tentai-je en examinant mes liens : des foulards plutôt résistants.

     

    Elle leva son regard et je frissonnai. Elle avait l’air ailleurs comme d’habitude, mais il y avait une petite étincelle au fond de ses yeux qui me mettait mal à l’aise. En plus du fait que j’étais attachée sur un lit sans que ça semble la déranger.

    — Le chasseur a dit que tu étais presque prête.

     

    Le chasseur ?

     

    — Quel chasseur ?

    — Le chasseur de lapins ! répondit-elle comme s’il s’agissait d’une évidence.

     

    Mais bien sûr, tout se ramenait aux lapins chez elle.

     

    J’étais pas sortie d’affaire !

    — Lucy, tu peux me détacher ?

    — Non.

    — Mais je pourrai pas éloigner les lapins sinon !

    — Le chasseur les a tués.

     

    Elle se pencha sur moi et murmura sur le ton de la confidence :

    — C’est très bon avec de la moutarde.

     

    Ok, c’était encore plus flippant !

     

    — Et… Et… Pourquoi je suis attachée alors ?

    — Parce que le chasseur l’a dit.

     

    Mais c’était qui ce putain de chasseur ?!

     

    Oh !

     

    Oh mais non quoi !

     

    Non ! Non ! Non ! ! !

     

    Ça ne pouvait quand même pas être…

     

    Mais non !

     

    Mais si, il n’y avait qu’une personne dans cette fichue baraque.

    Je me disais bien que ce type était louche !

     

    Et quel bon acteur !

     

    Mais comment Lucy… ? Et comment…. ? ? ? ?

    Qu’est-ce que c’était que ce délire ?!

     

    Je tirai un peu sur mes poignets mais constatai bien vite que la personne qui m’avait attachée aux barreaux du lit était une experte.

     

    Bon, et rien pour m’aider dans cette chambre ?

    Voyons, la porte était derrière moi, donc j’étais à l’envers sur le lit, les fenêtres à ma droite, une paire de rideaux roses, des poupées, des poupées, des poupées, une chaise en bois blanc avec des rembourrages roses, une armoire trèèès…

    J’avais vraiment l’impression de me trouver dans la maison de Barbie… Enfin de Barbie Princesse… Barbie Princesse Pouffe.

    Bon, autant revenir à la première solution : amadouer Lucy.

    — Lucy, pourquoi tu es dans cette maison ?

     

    Trop tard, elle était repartie dans son monde et chantait.

    — Promenons-nous dans les bois, pendant que les lapins sont là, si les lapins n’y étaient pas, on ne les mangerait pas tout crus.

     

    Glauque à souhait.

     

    On entra dans la chambre et je dû me déboiter le cou pour voir le ténébreux sur le pas de la porte.

    — Ah, tu es réveillée.

     

    Non je dors les yeux ouverts !

     

    Il se rapprocha et prit la seconde chaise pour s’asseoir à côté de Lucy.

    Bon sang, son sourire était sacrément malsain ! Je crois que je le préférais quand il tirait la tronche !

    — Qu’est-ce que ça veut dire tout ça ?

     

    Peut-être qu’il me donnerait une explication plus claire que celle de Lucy. Non, pas peut être, c’était sûr !

    — Je suis le chasseur de lapins.

     

    Ah… En fait non…

    Il était carrément barge et je sentais que moi aussi je le devenais.

    — Mais bordel, quelqu’un pourrait pas me donner une explication logique une bonne fois pour toutes ?!

     

    Je n’avais plus la patience de jouer à leur petit jeu de malades mentaux.

    — Eden… commença le taré mâle. Eden m’a enlevé Lucy il y a très longtemps.

     

    Eden a kidnappé Lucy ????!!! Mais pourquoi ?

     

    Et c’est lui qui a tué Eden alors ?

    — Elle disait que ma petite Lucy était mieux sans moi.

     

    Sa voix tremblait sous l’émotion et je pouvais voir des petites larmes perler au coin de ses yeux. Sortez les violons, voici la séquence dramatique de l’histoire !

    — Alors que c’était tout le contraire ! Moi seul sais comment la protéger des lapins !

    — Et comment ?

    — En les mangeant.

     

    Un long frisson me parcourut lorsque je compris enfin.

    Le tueur cannibale… Les disparitions de Lucy…

    — Alors ces victimes dévorées…… Mais…

     

    Non, quelque chose clochait.

    — Elle n’est pas assez forte pour les avoir maitrisées.

    — Bien sûr, j’étais là à chaque fois. Je ne l’ai jamais quittée depuis que je l’ai retrouvée.

     

    OK… Donc c’était lui qui avait tué tous ces gens et les avait bouffés avec Lucy.

    On ne peut pas dire que j’étais dans la meilleure des situations !

     

    Gagner du temps. Gagner du temps. Il n’y avait plus que ça à faire !

     

    Oh bordel dans quel bordel je m’étais fourrée bordel !

    — Mais la mission contre Eden ?

    — Ce n’était qu’un prétexte. Mon véritable but était de récupérer ma chère Lucy.

     

    Et comme pour illustrer ses propos, il la prit dans ses bras. Comme c’était… Répugnant.

    Et personne dans l’organisation n’avait remarqué que ce mec n’était pas net ? C’était pourtant flagrant !!

     

    Sommes-nous tous réellement sains d’esprit ? Les autres membres traînent aussi leurs propres névroses…

     

    Toi la ferme.

     

    Je réfléchissais à toute vitesse.

     

    — Mais… Pourquoi avoir tué Eden ?

     

    Il fronça les sourcils, visiblement surpris.

    — Je ne l’ai pas tuée.

     

    Oh… Étrange… Peu logique…

     

    Résumons :

     

    Le ténébreux avait pris toute l’équipe d’Eden ou presque pour monter un plan dont le véritable but était de récupérer Lucy. Mais pourquoi ne pas l’avoir enlevée tout simplement quand il l’a retrouvée?

     

    Parce qu’il est taré.

     

    Parce qu’Eden ne l’aurait pas laissé faire surtout ! Si ça se trouve, il faisait déjà bouffer des gens à Lucy et c’était pour ça qu’Eden l’avait prise sous son aile !

    Pour la protéger de son influence !

    Du coup ça expliquait pourquoi les meurtres avaient commencé pile au moment où il nous avait contactées.

    Mais j’étais là à chaque fois !

    Non…

    Et là, l’illumination…

    — Vous m’avez droguée…

     

    Ce n’était pas une question mais une constatation : Lucy m’avait filé quelque chose à boire à chaque fois.

    Et maintenant ? Que comptaient-ils faire de moi ? Me bouffer ?

    Attachée comme j’étais, ça serait pas difficile pour eux…

    Je soupirai, les regardai se câliner et songeai à ces derniers jours.

    J’aurais jamais pensé que, sur les deux seules personnes que je fréquentais depuis des années, je tenterais d’en tuer une et me ferais tuer par l’autre.

    Dans un sens, la boucle était bouclée, même si je ne savais toujours pas qui avait tué Eden.

    Bon sang, je n’allais quand même pas mourir aussi connement ! Il y avait bien une solution !!

     

    Moi ?

     

    Et puis quoi encore, si je te laissais faire je te retrouverais à prendre le repas avec eux !

     

    ….

     

    Prendre le repas avec eux…

     

    J’avais peut être une idée.

    — Lucy, j’ai souvent fait fuir les lapins, et tu comptes me manger ?

     

    Le ténébreux répondit à sa place.

    — Ta chair nous aidera à les faire disparaitre.

    — Je suis à bout de nerfs, je serai indigeste.

     

    Il fallait bien une première fois à tout, mais parler du goût que je pouvais avoir… J’aurais préféré éviter.

    — Je serais peut-être plus utile pour autre chose, ramener d’autres victimes par exemple.

     

    Lucy semblait intéressée, sa petite tête blonde reposait sur le torse vêtu de noir du ténébreux. Qui semblait moins emballé.

    — On dirait n’importe quoi pour survivre. Ne me prends pas pour un idiot.

     

    Gloup.

     

    Bon, ok, ce type était peut être malade mais pas idiot. Après tout, il avait monté ce plan, tordu, certes, mais il avait quand même monté ce plan et enrôlé pas mal de monde là-dedans.

     

    J’ai même failli me laisser avoir.

     

    Vas-y au culot, déstabilise-le.

     

    Le déstabiliser… Le déstabiliser…

     

    Prends un regard assuré et provoque le.

     

    Je suis totalement malade…

     

    Laisse-moi faire si tu n’as pas assez de cran pour sauver ta peau.

     

    La bonne blague !

     

    Bon, bon, regard assuré…

     

    Mais pourquoi je suivais ces conseils moi ?!

     

    Parce que tu n’as pas d’autre solution pour le moment.

     

    Pas faux.

     

    — Non, tu n’es pas stupide, je m’en doute bien… Mais en effet, je serais capable de tout pour survivre.

     

    Un sourire malsain s’étira sur ses lèvres et je dus puiser au plus profond de mes réserves de courage pour ne pas pleurer en appelant à l’aide.

    Il plongea sa main dans sa poche et en sortit un couteau dépliable.

    Maman à l’aide !

     

    Maman ? Avec tout ce qu’elle t’a fait ?! T’es tombée bien bas.

    Je sentis une pression au fond de mon crâne.

     

    L’autre poussait.

     

    Fermant les yeux, je résistai tant bien que mal, ne faisant plus attention à ce qu’il se passait à l’extérieur jusqu’à ce qu’une violente douleur nous paralyse totalement.

    Je hurlai en ouvrant les yeux et hurlai encore plus fort en découvrant ce qu’il se passait.

    Le ténébreux avait baissé mon pantalon et était en train de découper tranquillement un bout de ma hanche, un peu comme un boucher découperait un morceau de jambon.

    Je jurai, gueulai et me débattis ce qui me fit encore plus mal puisque je tirai sur le morceau de chair encore attaché à ma hanche.

    Lorsqu’il eut terminé, il tint entre ses mains ce petit bout de viande d’à peine cinq centimètre et l’observa à la lumière.

    — Tu n’es pas très grosse. Constata-t-il, comme déçu.

     

    J’aurais pu lui répondre un truc cinglant, mais là, je n’avais qu’une envie, gueuler encore plus et chialer comme c’était pas possible.

    Qu’es- ce qu’il allait faire maintenant ? L’avaler ? Le donner à Lucy ?

     

    Oh non, vu ce regard c’était autre chose.

     

    Oh non nonnonononon !

     

    Je serai les lèvres lorsqu’il l’approcha de mon visage mais son autre main m’attrapa en serrant ma mâchoire si fort que je cru un instant qu’il allait la briser.

    — Mange et je te laisserai en vie.

     

    Putain quel malade !

     

    Mais quel malade !!!!!

     

    Mon nez bouché me fit me rendre compte que je pleurais à chaude larmes depuis un certain temps. L’air se fit rare et la voix au fond de ma tête poussa de nouveau en me hurlant d’ouvrir la bouche.

     

    C’était ça ou mourir… Et je ne voulais pas mourir.

     

    Sommaire 

    Chapitre 19 : Not alone

     

    Je manquai de vomir plusieurs fois mais finalement avalai sous le regard froid du couple d’enfer que formaient Lucy et le ténébreux.

    Si ça se trouve, il bluffait et voulait juste me faire faire plein de trucs dégueu avant de me tuer.

    Une petite main gelée se posa sur ma joue alors que je tentais de calmer ma crise de larmes.

    — Les lapins sont si méchants…

     

    Bon sang est-ce que Lucy pouvait piger quelque chose de ce qu’il se passait pour une fois?!

    Elle se mit à fredonner quelque chose et j’eus l’envie de mordre sa main qui me caressait le visage, mais la simple idée d’introduire de nouveau quelque chose d’humain dans ma bouche me donna la nausée.

     

    La méga nausée.

     

    Ne vomis pas !

     

    Ce simple ordre m’aida à la faire passer.

     

    Pour un moment.

     

    Ma hanche me faisait un mal de chien et je n’arrivais toujours pas à me calmer.

     

    Ding dong.

     

    Ding dong ?

     

    Mon cœur bondit en manquant d’exploser ma poitrine.

     

    On sonnait à la porte !

     

    Une nouvelle crise de larmes, plus forte encore m’agita et chaque soubresaut titillait mes blessures.

    J’avais envie de hurler le plus fort possible pour qu’on vienne me chercher mais je savais très bien que le ténébreux m’égorgerait au moindre petit son que je produirais.

    Il avait du sang sur les mains mais rien d’autre qu’un coup de savon ne pourrait effacer. Rien pour le trahir. Rien. Rien. RIEN !!!

    Et à voir le regard qu’il me lançait, je savais qu’il ne tiendrait jamais sa promesse. J’étais foutue.

    Il ne me restait plus aucune chance d’y échapper.

     

    Enfin……

     

    Un long fou rire me secoua et, tandis que je tous mes muscles se détendaient, résignés, j’ouvris grand les portes dans mon esprit.

     

    Maintenant c’était moi la voix dans la tête de l’autre.

     

    Le ténébreux prit un des couteaux qu’il m’avait confisqué et l’approcha de mon visage.

    Je m’agitai, tentai de tourner la tête, mais n’avais plus aucun contrôle.

     

    Sois encore heureuse que je te laisse regarder.

     

    L’Autre (avec un grand A majuscule pour bien la différencier) restait calme alors que le ténébreux lui ouvrait la bouche, ma bouche, y introduisit la lame et m’obligea à refermer la mâchoire.

    — Tais-toi ou tu mourras.

     

    Si j’ouvrais la bouche, la lame tomberait au fond de ma gorge et me tuerait.

    Je pourrais tenter de la repousser du bout de la langue…

    — Lucy, ma chérie, veille à ce qu’elle garde le couteau dans la bouche.

     

    Lucy acquiesça et le regarda s’éloigner.

     

    Bon sang, qu’est-ce que j’allais faire ?!

     

    Toi, rien.

     

    Quelle idée j’avais eu de laisser l’Autre prendre le dessus ! Non mais quelle idée !

    Sans doute la pire de tout l’univers !

     

    La ferme, j’écoute.

     

    Qu’est-ce que tu écoutes ?

     

    La porte d’entrée. Il l’a ouverte et il parle avec un homme.

     

    Etan ?

     

    Aucune idée. Aucune importance.

     

    Je sentis ma tête se tourner vers Lucy. Je lui souriais. Pourquoi je lui souriais ?

    Lucy ne parut pas très surprise de me voir sourire dans une telle situation. Ça ne m’étonnait même pas.

    Elle me sourit en retour et jeta un regard vers la porte.

    — Je n’ai pas le droit de t’enlever le couteau.

     

    L’Autre hocha la tête, toujours calme.

    Lucy hésita.

    Peut-être que quelque chose au fond d’elle lui disait qu’il y avait un truc anormal.

     

    Où qu’on s’est résignés à chasser le lapin avec elle.

     

    N’importe quoi.

     

    Qui d’autre qu’un psychopathe pourrait comprendre un autre psychopathe ? Réfléchis bien.

     

    Pas faux.

    Mais comment rester calme dans une situation pareille ?!

     

    C’est le calme avant la tempête, ferme-la et observe.

     

    — Tu ne vas pas crier ?

     

    C’était étrange d’entendre Lucy parler normalement.

     

    Elle n’a plus ses lapins, le chasseur les a tués. On peut dire qu’elle va mieux du coup.

     

    … Dans un sens, logique.

     

    Réaction logique aussi, je fis non de la tête.

     

    J’aurais fait pareil.

     

    Contre toute attente, Lucy se leva et saisit le couteau.

    — Le chasseur a dit qu’il ne faut pas. Mais tu es sage, non ?

     

    Léger sourire de l’Autre qui finit de convaincre Lucy.

    Le sourire s’élargit lorsqu’elle retira la lame.

    — Tu es vraiment gentille Lucy.

     

    C’était étrange de m’entendre prononcer des mots sans même l’avoir voulu, sans le contrôler ni même y songer.

     

    Je ne faisais qu’assister.

     

    Elle écoutait en observant Lucy. À quoi pensait-Elle ?

    Ça ne me ressemblait pas d’être aussi calme. La preuve, j’étais en train de m’agiter au fond de ma tête.

    — C’était bon tout à l’heure. Je peux en avoir un autre bout ?

     

    QUOI ?!

     

    Laisse-moi faire.

     

    Et te laisser me bouffer ?! Et puis quoi encore ?!

     

    Rends-moi le contrôle !

    — Vraiment ?

    — Oui, et toi, tu aimes ?

     

    Lucy hocha la tête.

     

    Mais laissez-moi sortir bordel ! Laissez-moi !!! Je veux pas mourir !

     

    Tu ne mourras pas, chochotte.

     

    C’est pas l’impression que tu me donnes !

    — Tu veux quel morceau ?

    — Je sais pas. Peut-être un bout de main.

    — Elles sont attachées.

     

    J’avais remarqué Lucy !

    Non mais merde ! Il n’y avait que moi qui voulait sauver ma peau ou quoi ?!

     

    — Il faudrait en détacher une alors.

    — Mais… Hésita Lucy.

    — Juste une. Je serais sage.

     

    Oh oui, juste une !

    Ou les deux ! Ça ne me dérangerait pas du tout !

     

    Tiens, tu viens seulement de comprendre ?

     

    Je ne répondis pas, jubilant en voyant Lucy détacher ma main droite.

     

    J’en chialais de soulagement.

     

    Enfin, j’en chialais intérieurement.

    L’Autre était toujours calme, souriante même.

     

    Lorsque ma main fut libre, Elle la bougea pour la dégourdir et la tendit à Lucy qui réfléchit.

    — Il vaudrait mieux que tu mordes dedans. Conseilla-t-elle. C’est dur de couper.

    — Oui, c’est vrai.

     

    Soudain, je tournai la tête vers l’autre côté du lit, comme si j’avais entendu quelque chose.

    Bon sang, qu’est-ce que je faisais ?! Il n’y avait rien et je tournais le dos à une malade mentale ! Enfin, je lui tournais la tête.

    — Tu as entendu ?

    — Quoi ?

    — Tu n’as pas entendu ? Là-bas, il y a quelque chose. Indiquais-je de l’index.

     

    Intriguée, Lucy se pencha au-dessus de moi pour regarder dans la direction que je lui pointais.

    — Non, je ne…

     

    Avant même qu’elle ne termine sa phrase, je lui avais tordu le cou et le corps sans vie de Lucy retomba sur le mien.

     

    Lucy…

     

    L’Autre était toujours calme et une colère sourde monta en moi. Elle avait tué Lucy !

     

    Ah parce que maintenant tu penses que c’est moi la méchante de l’histoire ?

     

    C’était illogique. Oui, illogique, mais la mort de Lucy ne me laissait pas insensible. Ce n’était pas vraiment de sa faute ! C’était ce type qui l’avait entraînée ! Ce type qui avait tué tous ces gens pour que Lucy les dévore !

    Un regard à l’extérieur de ma tête m’informa que j’étais debout, pantalon remonté et fermé. Mes jambes étaient un peu ankylosées et ma hanche et mon estomac me faisaient souffrir le martyr, mais je tenais quand même miraculeusement debout.

    Couteau à la main, je me dirigeai en boitant vers la porte et l’entrouvris légèrement afin d’entendre ce qu’il se passait. Le jean frottait contre ma hanche, provoquant d’atroces souffrances.

    Combien de temps s’était-il écoulé depuis que le ténébreux était sorti ? Dix minutes ? Quinze ?

    La voix d’Etan retentit ?

    — Qu’avez-vous fait de Kaelle ?

     

    Barre-toi Etan ! hurlai-je.

    Mais je ne pouvais qu’observer et laisser l’Autre agir.

     

    C’était un peu comme dans un film d’horreur. On gueule après les personnages de se tirer de là, on essaye de les prévenir du danger, mais ils ne peuvent pas nous entendre.

    Me faufilant près des escaliers, je bénis le bois récent dans lequel elles avaient été construites.

    Pas de craquement donc possibilité de se faufiler en bas en silence.

     

    Hé ! Mais qu’est-ce que je fais là ?!

    Hé ! Non ! En bas ! C’est en bas que ça se passe !

     

    Mais c’est en haut qu’est caché le reste des armes. Dans les autres pièces.

     

    Ah… oui…

    J’étais vraiment conne.

     

    Blessée et à bout de nerfs.

     

    C’était gentil de me remonter le moral.

     

    Mais on ne peut pas non plus dire que tu sois une flèche.

     

    Peste… Oh cool ! Un silencieux avec viseur !

     

    Un coup de feu en bas nous fit sursauter.

     

    Etan !

     

    J’avais envie de courir pour voir ce qu’il s’était passé, me rassurer en quelques sortes, mais un second coup de feu retentit, puis un troisième.

    Qu’est-ce qu’il se passait bon sang ?!

    Tourne la tête vers la porte d’entrée, tu verras peut être quelque chose !

    La porte ! Pas la fenêtre !

     

    Qu’est ce qu…

     

    L’Autre se dirigea vers la fenêtre et jeta un coup d’œil dehors.

     

    N’y pense même pas !

    Déjà c’est trop haut, ensuite, il se passe quelque chose d’anormal en bas, et enfin, je suis trop amochée pour descendre par-là !

     

    Tu marques un point.

     

    Je veux oui !

     

    Et ma hanche me faisait terriblement souffrir ! Il fallait faire quelque chose pour ça !

    Compresse la plaie ! Compresse !

    Ma main pressa le plus fort possible dessus et je bénis mon ambidextrie en me dirigeant péniblement vers la sortie, flingue dans l’autre main, avant de me rétracter en entendant des bruits de pas dans les escaliers.

    L’Autre souffla doucement, retira la sécurité de l’arme et risqua un coup d’œil dehors, prête à tirer.

    C’est ce qu’elle fit immédiatement tandis que je lui hurlais de le faire, priant pour que le ténébreux, blessé à l’épaule, ne soit plus rapide.

    Le chargeur se vida sur lui et il s’effondra, mort.

     

    C’était fini.

     

    Non, il y a d’autres personnes dans la maison.

     

    Jetant le flingue par terre, elle s’empara du couteau et ne bougea pas d’un poil, se repliant de nouveau dans la pièce.

    — Kaelle ?

     

    C’était la voix de Daniel !

     

    Il est peut-être dans l’autre camp !

     

    Il s’est défendu contre l’autre malade ! Laisse-moi reprendre le contrôle ! On ne risque plus rien !

     

    Non !

     

    Dis-lui au moins quelque chose !

    — C’est toi Daniel ? Tu es tout seul ?

     

    Il y eut un grand silence en bas.

    — Oui, Etan était avec moi mais il l’a descendu.

     

    Laisse-moi sortir !!!

    Laisse-moi reprendre mon corps ! C’est fini, tu vois pas ?!

     

    L’Autre ne réagissait pas. Elle se concentrait sur les pas qui montaient les escaliers, prête à se battre.

     

    Il n’y a aucune raison de le tuer ! Il est de notre côté ! Laisse-moi faire !

     

    Une porte grinça et j’entendis Daniel jurer.

    Il devait avoir trouvé le cadavre de Lucy.

    — Kaelle ?

     

    Je suis là ! Je suis là !

    Mais dis-lui bordel !

     

    La ferme !

     

    Je poussais pour reprendre le contrôle, frappais, hurlais et l’autre résista.

    Il me fallait plus de force !

    Je pensais à ce qu’Etan m’avait dit.

     

    L’Autre était une psychopathe !

     

    L’Autre était au même rang que ces putains de cannibales !

     

    Ce n’est pas vrai !

     

    Si c’était vrai ! Si !

     

    Je me remémorai le cadavre de mes parents et le souvenir de ce carnage me donna de quoi reprendre le contrôle.

     

    Je ne voulais pas être comme ça !

     

    Puis ce fut le calme dans ma tête.

    — Kaelle ?

    — Je suis là !

     

    J’étais épuisée, mon corps tout entier me faisait souffrir et c’était sans compter sur la migraine qui commençait à s’installer.

    Mais je devais quand même rester sur mes gardes.

    Daniel ouvrit la porte et je posai immédiatement ma lame sur sa gorge.

    — Est-ce que tu savais ce que ton soit disant chef trafiquait ?

     

    Daniel tourna la tête dans ma direction et fronça les sourcils en me voyant.

    Je devais vraiment être dans un sale état.

    — Je n’en ai toujours aucune idée.

     

    Il avait l’air sincère, mais personne au monde ne m’aurait répondu positivement. Personne sain d’esprit en tout cas.

    Je sentais les larmes monter de nouveau.

    Daniel profita de ce petit moment d’inattention pour attraper mon poignet et me désarmer doucement.

    — C’est finit Kaelle. Il est mort.

     

    Je le savais déjà ça.

     

    Je le savais mieux que personne !

     

    Mais le fait de l’entendre me fit craquer et je m’effondrai en pleurant contre Daniel.

    — Tu es blessée quelque part ?

    — Je… Oui je…

     

    J’avais bouffé un morceau de moi…

     

    Ce souvenir me retourna les tripes et je me permis enfin de vomir.

     

     

     

     

     

     Sommaire

    Epilogue : The end ?

     

    Il pleuvait.

    Il pleuvait mais je me sentais plus que jamais vivante.

     

    Daniel m’avait hébergée chez lui le temps que je me remette de mes blessures et s’était affairé à faire éclater la vérité au grand jour.

    Enfin, pas toute la vérité, mais juste assez pour boucler l’affaire du tueur cannibale aux yeux des médias et des flics.

    Il s’était ensuite reconverti. En quoi ? Aucune idée. Il m’avait juste annoncé que le métier de mercenaire lui était passé avec toute cette histoire et qu’il se sentait fautif.

    Tellement fautif qu’il m’avait même pris sous son aile, filé un petit paquet d’argent, de faux papiers d’identité et hop, direction les Etats Unis !

    Je m’appelais Hélène Ronaut à présent, et j’étais au chômage. La loose non ?

     

    Enfin, pour le moment, ma principale préoccupation était de rentrer à l’hôtel où je vivais, depuis quelques semaines, avec une pizza que la pluie tentait d’infiltrer.

     

    J’avais pas mal changé depuis ces derniers évènements, d’abord je m’étais coupé les cheveux. Allez savoir pourquoi, une nouvelle coupe, ça aide à passer à autre chose. C’était ridicule mais ça marchait. Ensuite j’avais plus touché un morceau de viande. Ça me filait la gerbe.

    Si un jour on m’avait dit que je deviendrais végétarienne…

     

    Et enfin, je n’avais plus aucune nouvelle de l’Autre.

    Elle était sans doute en vacances prolongées.

    Je l’espérais.

     

    Un homme me bouscula et je vérifiai instinctivement dans ma poche.

    Il était toujours là.

     

    Le téléphone d’Eden.

     

    Ma seule et unique piste pour découvrir ce qu’elle était et qui l’avait tuée.

     

     

     

     

     

     

    « Alone in the nightGrand concours du nouvel an »

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  • Commentaires

    1
    Lundi 8 Août 2016 à 04:48

    Eh bien !! Je ne sais pas trop quoi dire j'avoue ! xD Juste c'était génial ! J'ai rien deviné de la fin, les chapitres donnaient envie de les enfiler, Kaelle était chouette et on apprend son passé petit à petit. Peut-être quelques manques sur le passé de Lucy ou quoi mais en général c'était super !

    Et j'aimais beaucoup la narration !

    2
    Mardi 9 Août 2016 à 12:32

    Awwwwww sachant que ça date l'air de rien, et que j'ai voulu le refaire plein de fois (je trouve qu'il y a beaucoup de lacunes et de soucis avec les temps), ça fait super plaisir !!! J'ai la suite en attente et je voulais faire une bd sur l'histoire de lucy (un truc tout court) ^w^

      • Mardi 9 Août 2016 à 12:35

        Oui ce serait mentir de dire que tout est parfait, mais je trouve qu'on a envie de savoir la suite et tout et c'est déjà super ! (puis surtout je veux pas que tu déprimes et recommence tout D8 (mais si j'avais pas aimé, je te l'aurais dit xD))

        Oh oui une BD \0/

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